L’édito du Kiosque : « Le choix de Sonia »

Le 13 novembre 2015, Paris était frappée par une vague d’attentats particulièrement sanglante. Une héroïne sans visage a risqué sa vie pour aider à neutraliser les terroristes.
AFP

Sonia est une héroïne sans visage. Elle est ce que son choix a façonné dans un sacrifice plus puissant que le mal. En embrassant l’espoir plutôt que la peur, elle a immolé sa vie, celles de monstrueux sanguinaires, elle s’est dévouée à la mesure de son devoir, du plus haut des idéaux. Son courage a sauvé des gens, au détriment de sa propre existence, d’un avenir condamné au silence, à l’anonymat, à la menace prégnante de ceux qui ne l’oublieront jamais. Depuis 2015, Sonia est « Madame Personne », au nom, au prénom empruntés à l’imaginaire de son statut spécial de témoin protégé. Il y a 10 ans, son intervention avait permis de localiser le cerveau présumé des auteurs des funestes attentats du 13 novembre. Cinq jours plus tard, à 4h10, Abdelhamid Abaaoud, sa cousine Hasna Aït, un temps hébergée par Sonia, et un complice, étaient neutralisés dans l’assaut final du RAID dans leur cache de Saint-Denis. Manquait parmi les terroristes, Salah Abdeslam, arrêté à Molenbeek (Belgique) le 18 mars 2016, après une cavale de 125 jours. Ce chauffeur présumé dont la ceinture d’explosifs n’aurait pas fonctionné lors de la nuit sanglante marquée par les bombes du Stade de France, les fusillades des terrasses parisiennes et le carnage du Bataclan. 132 personnes perdirent la vie, 400 furent blessées, le pays entier était meurtri, traumatisé par l’ampleur du chaos provoqué par la pire attaque terroriste de son histoire.

« Tenir debout quand tout vacille. »

Ce jeudi donc, sur chacun des lieux des attentats, étaient organisés des hommages à la mémoire des victimes recensées dans le jardin mémoriel édifié derrière l’Hôtel de Ville de Paris. Un « oasis de calme et d’apaisement en hommage à la vie et à la résilience », lieu de recueillement où se retrouvait toute une nation, dont son ancien chef d’État. François Hollande, se confiant par ailleurs « non pas seulement en ancien président, mais en homme traversé par l’effroi, la gravité et la responsabilité », dans une interview donnée au magazine Psychologies. Pris par l’émotion, « l’instant où le doute s’efface, la « comptabilité terrible » des victimes, les décisions prises dans l’urgence, celles qui engagent une nation tout entière (…), les regards croisés au Bataclan, le poids du silence après l’épreuve (…). Comment protéger sans renoncer, garder la tête froide quand l’émotion déborde ? Et surtout, qu’est-ce qui nous fait tenir debout quand tout vacille ? » Le cruel réalisme de cette nuit sanglante a sidéré tout un peuple soumis au tragique spectacle de l’horreur, de la mort, mais aussi à l’émanation réconfortante de formidables solidarités. Du courage, de l’altruisme et de la fraternité des agents de l’État, des bénévoles et anonymes, de tous ceux qui font nation. En première ligne comme dans le rang, voire dans le lointain vaporeux, celui d’une inconnue à l’âme généreuse, sacrifiée par son choix.

Georges Chabrier

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