Alerte communes en mal d’assurance ! Au fil d’années marquées par toujours plus d’inondations et de tempêtes, au fil de périodes de violences urbaines ou de mouvements de colère dans les rues ; la « chambre des territoires » veut soulager les maires en essayant de leur « garantir » une solution d’assurance. Ces derniers se plaignent en effet de difficultés croissantes dans leurs relations avec les assureurs, avec des contrats parfois résiliés, ou encore des primes ou franchises devenues exorbitantes pour le risque dû aux émeutes ou aux aléas climatiques. « Le marché de l’assurance des collectivités, à la suite d’une guerre presque fratricide des prix, a été déserté par la quasi-totalité des assureurs« , a constaté le sénateur Les Républicains Jean-François Husson, auteur d’une proposition de loi adoptée à l’unanimité au Sénat, en première lecture. Son initiative, désormais transmise à l’Assemblée nationale, est globalement soutenue par le gouvernement qui travaille en parallèle à un « plan d’action » présenté en avril sur ce dossier technique. Le texte étend notamment le champ de la « garantie obligatoire » des contrats d’assurance aux dommages résultant « d’émeutes et des mouvements populaires », une manière de répondre aux cas de dégradations survenues par exemple lors de la crise des gilets jaunes ou des violences urbaines de l’été 2023 consécutives à la mort du jeune Nahel. Un « fonds prudentiel » serait associé à ce mécanisme, financé par une « surprime » due par les assurés sur leurs contrats, afin d’assurer la « mutualisation » de ce risque spécifique, sur le modèle déjà existant des catastrophes naturelles. Le ministre de l’Economie Eric Lombard a été sensible à ces propositions, mais il a noté qu’ils exigeraient en parallèle « une nouvelle garantie de l’Etat« , promettant de proposer un dispositif en ce sens d’ici les débats budgétaires de l’automne. Certains, à gauche, ont émis des réserves sur la « focalisation » du débat sur la question des émeutes, ou sur le risque que la surprime proposée ne devienne in fine « un impôt déguisé » demandé aux collectivités, aux particuliers et aux entreprises. Autre proposition des sénateurs, la systématisation des franchises dans les garanties souscrites par les collectivités, qui permettrait, selon ses défenseurs, de « réduire le coût » des contrats tout en responsabilisant les communes. D’autres dispositions pour fluidifier le lien entre assureur et collectivité ont été adoptées, comme un mécanisme encourageant le recours à la médiation.
Répondre à l’urgence
Ce mercredi 11 juin 2025, le Sénateur et Vice-président de la commission des finances Emmanuel Capus (Horizons) a soutenu au nom de son groupe Les Indépendants – République et Territoires la proposition de loi visant à garantir une solution d’assurance pour l’ensemble des collectivités territoriales, présentée par le Sénateur et Rapporteur général de la commission des finances Jean-François Husson (LR). Le Sénateur Emmanuel CAPUS explique : « Cette proposition de loi répond à une urgence bien connue des élus locaux, qui nous alertent régulièrement sur leurs difficultés à souscrire une assurance ou sur les hausses brutales de leurs primes. Depuis une dizaine d’années, nos collectivités font face à des risques accrus pesant sur les bâtiments publics et le mobilier urbain. Face à ce constat, la commission des finances du Sénat a lancé, en janvier 2024, une mission d’information sur les difficultés assurantielles des collectivités. Celle-ci visait à dresser un état des lieux précis et à formuler des recommandations concrètes pour garantir aux collectivités des conditions d’assurance viables. Fort de ce rapport d’information, j’ai tenu à aller à la rencontre des élus de mon département, notamment en participant à un événement organisé en juillet par l’AMF 49 et Groupama. À cette occasion, j’ai pu restituer les principales conclusions de la mission concernant la prévention, la formation des agents et les recours possibles face aux assureurs. J’ai également présenté les excellents travaux d’Alain Chrétien sur l’assurabilité des biens des collectivités locales et de leur groupement. Cette proposition de loi va dans le bon sens et permet plusieurs avancées. Elle renforce l’implication des nombreuses structures publiques ou parapubliques dans les relations entre assureurs et collectivités territoriales, tel que le Médiateur de l’assurance. Elle étend également aux biens des collectivités endommagés à la suite d’émeutes ou de mouvements populaires violents le bénéfice de la dotation de solidarité aux collectivités victimes d’événements climatiques ou géologiques. Concernant les contrats d’assurance, le texte étend la couverture des contrats d’assurance « dommages aux biens » aux dommages résultant d’émeutes et de mouvements populaires. Toutefois, la création de ce nouveau risque « émeutes et mouvements populaires », bien que nécessaire, doit nous interroger. Il est intolérable de laisser d’infimes parties de la population dégrader régulièrement les biens d’autrui, qu’ils soient publics ou privés. »
« Un premier pas attendu », pour Grégory Blanc
« La nuit dernière, le Sénat a examiné une proposition de loi issue de nos travaux, au sein de la commission des finances, visant à garantir une solution d’assurance aux collectivités territoriales. Partout en France, les collectivités rencontrent de grandes difficultés à s’assurer : appels d’offres sans réponse, résiliations unilatérales, hausse des primes et des franchises. De plus en plus de mairies, départements, … se retrouvent ainsi contraints de ne pas assurer, partiellement ou totalement, leur parc immobilier. Cela met sous pression les élus locaux, pleinement responsables face à l’insuffisance de l’offre assurantielle. Les collectivités, même les plus rigoureuses dans leur gestion, sont actuellement confrontées à un système défaillant. En effet, des politiques agressives de prix durant les années 2010 ont abouti au retrait progressif d’acteurs majeurs. Seuls demeurent aujourd’hui deux assureurs, Groupama et la SMACL. Or, cette contraction du marché limite l’accès à l’assurance pour de nombreux territoires déjà, et de plus en plus fortement, exposés aux impacts du changement climatique. Les sinistres climatiques devraient ainsi doubler d’ici 2050 pour atteindre 143 milliards d’euros. Inondations, incendies, submersions marines… des millions de personnes sont concernées. Le système actuel n’est pas préparé à cette nouvelle réalité. Ce texte constitue un pas utile à court terme, même si nous devons changer d’échelle pour repenser plus globalement la couverture des risques : l’assurance ne peut plus être considérée comme un simple produit financier, elle doit devenir un pilier de notre résilience territoriale. Face aux bouleversements climatiques et sociaux, il nous faut ainsi penser un cadre public de dernier recours, rouvrir le marché de l’assurance à de nouveaux acteurs, et garantir une protection minimale pour tous. Ce texte est une rustine. Nous avons besoin d’une refondation. J’ai voté cette proposition de loi, parce qu’il y’a urgence à agir, tout en appelant à poursuivre et approfondir le travail législatif. Désormais il appartient au gouvernement d’inscrire ce texte à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale afin que, très vite, à mes yeux avant les élections municipales, les candidats et élus puissent aborder en conscience ces enjeux. »
Avec AFP
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