Justice. Un trader autodidacte condamné pour une escroquerie entre le Maine-et-Loire et Hong Kong

Des millions d'euros perdus dans un fonds prétendument ultra-lucratif à Hong Kong: un trader autodidacte surnommé par la presse le "Madoff du Maine-et-Loire" a été condamné ce jeudi 28 mars à Paris à deux ans de prison ferme pour avoir escroqué des dizaines d'investisseurs.

Avec AFP

Guillain Méjane, 41 ans, a été condamné à cinq ans d’emprisonnement dont trois ans avec un sursis probatoire pour escroquerie, fourniture illégale de services d’investissement et blanchiment de fraude fiscale, le tribunal précisant que la partie ferme de sa peine serait aménagée, il n’ira donc pas en prison. Avec un ami d’enfance et associé, ils ont convaincu entre 2012 et 2014 des investisseurs de l’Anjou, dans leur entourage puis par bouche-à-oreille, de placer près de 16 millions d’euros dans la société Now For Tomorrow (NFT), immatriculée à Hong Kong. Alors qu’ils vantaient des rendements prodigieux grâce au trading sur le marché international Forex, 10,6 millions d’euros ont été perdus sur les marchés financiers selon l’enquête, qui a chiffré à 1,6 million d’euros le montant utilisé en dépenses personnelles par Guillain Méjane, le reste ayant d’autres destinations. Le prévenu a été condamné à dix ans d’interdiction de gérer une société et d’exercer une profession liée à la finance. Sa maison dans le Maine-et-Loire a été confisquée, comme le prix de vente d’une Ferrari acquise avec les fonds de NFT. Présent jeudi, il ne s’est pas exprimé devant la presse. Lors de son procès en janvier, il avait présenté ses excuses et reconnu une partie des faits reprochés, mais contesté toute escroquerie. Après un « travail de digestion » du jugement, il y aura un « travail de réflexion » concernant un éventuel appel, a déclaré son avocat Me Pierre-Henri Baert.

« Cynisme »

Dans son délibéré, la présidente a souligné la « gravité des faits », liée au « nombre de victimes, au montant du préjudice« , mais aussi à un « certain cynisme » du prévenu « qui manifestement a fait le choix délibéré d’exercer cette activité très risquée (…) sans aucun agrément, sans compétence et en se plaçant volontairement en dehors de toute surveillance ». Elle a aussi relevé la « singularité » de cette affaire, du fait de la « personnalité » du prévenu qui, « comme ses avocats l’ont souligné, a sans doute fait de son handicap une force, dont toutes les victimes ont souligné le charisme particulier ». Le prévenu est né privé de jambes et d’un bras. Le tribunal a considéré qu’il avait bien usé de « manœuvres frauduleuses », tant dans la plaquette commerciale de NFT que dans les bulletins hebdomadaires envoyés aux clients, qui ont « mis en confiance » de nouveaux investisseurs. L’ex-associé de Guillain Méjane, Gaëtan O., a lui été relaxé des poursuites pour complicité d’escroquerie, la juridiction considérant qu’il n’était pas au courant des pertes de NFT. Il a néanmoins été condamné à deux ans de prison avec sursis probatoire et 50.000 euros d’amende pour les deux autres mêmes infractions. La tante et la grand-mère de Gaëtan O. ainsi que le père de Guillain Méjane se sont vu infliger de la prison avec sursis et des amendes pour blanchiment. La défense de Guillain Méjane s’est « félicitée » que le tribunal soit resté « en-deçà des réquisitions » du Parquet national financier (PNF) – trois ans de prison ferme et 100.000 euros d’amende – et qu’il ait « retenu la faute des parties civiles qui ont concouru à la réalisation de leur dommage ». Une soixantaine d’investisseurs se sont constitués partie civile, comme l’Etat, et avaient demandé environ 6 millions d’euros. Au final, une partie s’est désistée et 41 ont obtenu une indemnisation, mais à 40% de leur préjudice, les magistrats jugeant qu’ils avaient commis une « négligence fautive« , en substance qu’ils avaient signé trop légèrement les contrats de NFT. Le montant total est de 1,26 millions d’euros en dommages-intérêts et frais d’avocats. « Il s’agit d’une décision à la hauteur des faits sur le plan pénal. En revanche le partage de responsabilités sur le plan civil est choquant et revient à rejeter la faute sur les victimes qui seraient responsables à 60% de leur malheur – autrement dit plus que les personnes condamnées« , s’est indigné un de leurs conseils, Me Paul Le Fèvre.

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