Dans notre belle cité, à bonne distance des tintamarres gouvernementaux, tout est calme, reposé. Seules, au gré du temps, les tintinnabulations des clochers protecteurs brisent le soupir de nos mélancolies d’automne. Nous y sommes, les arbres abandonnent leurs feuilles usées pour refouler le froid, l’hibernation est en marche, accentuant la léthargie, la basse pression d’une actualité localement engourdie. Comme s’il fallait attendre, encore, pour esquisser les couleurs du printemps prochain, les écussons adossés à la liste du futur maire de notre ville. Le 15 mars 2026, les élections municipales offriront à Jackie Goulet l’occasion de bisser son mandat au terme d’une agréable campagne mise en sourdine par des oppositions mécaniques, faméliques. Notre « Lecornu » local dispose en effet d’une solide et fidèle majorité dans laquelle macronistes, écologistes, radicaux et socialistes cohabitent dans une secrète et prospère osmose. À droite, la députée républicaine, Anne-Laure Blin, a été missionnée pour amadouer la flamme du prétendant déclaré, en concurrence, sur son bord extrême, avec un RN dont l’identité, comme à l’accoutumée, apparaîtra en filigrane, sous le portrait de l’égérie Bardella. Voire d’une autre, si un séisme judiciaire venait bouleverser la routine politicienne du parti. L’aile droite de l’échiquier soubresaute alors que bruisse la rumeur de l’affleurement d’un trublion, d’un apparenté, d’un bonapartiste ! Nous verrons, au fil des déclarations solennelles de candidatures, qui, plus encore, fait tracas à gauche. Une liste citoyenne (mais partisane) d’Union populaire est en gestation, peu ou prou concurrencée par l’initiative de Catherine Allereau et d’Ibrahim Chenouf, binôme associé pour porter un projet « écologiste et de rassemblement des forces de la Gauche ». Là où il n’y a guère d’espoir, ils devront l’inventer.
Trump à l’export
La campagne s’installe donc à pas feutrés dans notre belle cité, a priori préservée des idéologies franchisées gangrénant sournoisement nos sociétés. Discrètement, mais sûrement, le populisme étasunien s’exporte et notre pays, fatalement, s’expose aux puissants et fortunés fournisseurs d’opinions. Là-bas, ils fustigent la science, les universités, les institutions, les opposants, les immigrés, là-bas, s’immisce la religion dans tous les processus de l’État. Décomplexés, ils font en grand ce qu’entreprennent en douce quelques milliardaires gaulois, la réappropriation culturelle et politique du pays. L’ultraconservateur Pierre-Edouard Stérin en tête, via des fonds d’investissement fléchés vers des universités (Catholique de l’Ouest), en finançant des influenceurs, des cercles de réflexion ou des médias d’orientation à destination des jeunes, comme dans la Région Pays de la Loire présidée par Christelle Morançais ! « Le savoir traverse une période de vive remise en cause, menacé par un « populisme scientifique » qui se décline sous toutes les latitudes. » En ce sens, par la voix de Sibyle Veil, sa présidente, Radio France vient de lancer un appel invitant à préserver et à revendiquer la liberté de savoir dont l’érosion annihile les capacités de comprendre. « Dans un monde où la parole se détache du réel, où le citoyen est privé de ce qui lui permet de distinguer ce qui est prouvé de ce qui est cru, la démocratie devient vulnérable aux manipulations, à la défiance et aux passions ». Nous en mesurons tous les jours les effets et plus encore à chaque nouvelle expression du suffrage universel où chacune des trop peu nombreuses voix de citoyens pèse d’un même poids. Les candidats ayant à cœur de ne pas disqualifier ceux qui les contredisent ont la capacité de briser les clivages, de transformer les conflits en débats nécessaires et cruciaux pour la survie de nos démocraties. Bien tristement, l’exemple ne vient pas d’en haut. Puisse-t-il épargner notre belle cité ?
Georges Chabrier
Copyright © IGNIS Communication Tous droits réservés