L’édito du Kiosque : L’épais brouillard

Le doute plane sur le bien-fondé de l’intervention éclaire des bombardiers américains sur les sites nucléaires iraniens. Le scepticisme domine quant à la pleine réussite de l’opération. La perplexité s’impose sur les capacités de François Bayrou à trouver une voie de passage toujours plus étroite.
Photo AFP

Pouce ! la récré est terminée. Trump a bombardé l’Iran. C’est un héros. En deux temps trois mouvements, le maître du monde a obtenu la paix, par la force des bombes GBU-57, larguées par les furtifs B2. « Je peux dire au monde que les frappes ont été une réussite militaire spectaculaire, (…) les principales installations d’enrichissement nucléaire de l’Iran ont été intégralement et totalement détruites ». Balèzes le Donald et ses pilotes embarqués dans un « fly-trip » linéaire, sans encombre jusqu’aux destinations finales, les stations nucléaires de Fordo, Natanz et Ispahan. Le succès est total, un hit planétaire condensé dans un clip musical infantile, sur « Bomb Iran », vieux tube des Beach Boys (1979). L’Amérique est assurément la toute première puissance planétaire, son président s’affiche en roi dont le pouvoir est l’aphrodisiaque absolu. De quoi émoustiller Xi jinping et Poutine observateurs bien silencieux des extravagances du « Magalomane » de Mar-a-Lago. La diplomatie balourde du bonimenteur n’avait pas fait cesser les armes en Palestine, ni en Ukraine, ses forces ont enrayé la guerre entre Israël et l’Iran, selon son extrême satisfaction exprimée dans l’euphorie du moment. Le récit mirifique de cet exploit tend opportunément à cacher des failles coupables, inavouables par l’intéressé en traque ouverte contre ses services de renseignements, son opposition, la presse, peu convaincus de l’impérieuse nécessité d’atomiser les sites nucléaires, peu enclins à partager la liesse d’une réussite fantasmée.

Dans son cockpit

Sans la chute du régime en place, les hostilités reprendront inévitablement entre Israël et des mollahs, décapités, affaiblis, mais toujours en vie. Et pour longtemps en maîtrise des technologies de fabrication de l’arme fatale, en richesse cumulée d’uranium, volatilisé, caché quelque part dans les abysses de la Perse éternelle. Le peuple martyr iranien attendra et, malgré la résistance opiniâtre, finira par prendre seul la citadelle. La satisfaction du devoir accompli, Donald Trump a sitôt quitté sa « situation room » de la Maison Blanche pour s’en aller pavoiser à la Haye, dans le confort ouaté du sommet de l’OTAN. Une apparition de star chez ses fans ébaubis par l’aura du maître auquel on ne peut accorder que des faveurs. Il a gagné. Les Européens consacreront désormais 5% de leur PIB pour se réarmer et assurer leur défense en cas d’interprétation oiseuse de l’article 5 du traité stipulant que les alliés se protégeront mutuellement en cas d’attaque armée. « C’est une réussite extraordinaire » a proclamé fièrement Trump dont les avions F15 et F16 grossiront encore copieusement les flottes de l’UE, malgré les prouesses remarquées de notre Rafale, au salon du Bourget. Le standard F5 de chez Dassault appelé à équiper nos armées à partir de 2033 et dont le public avait l’occasion exceptionnelle de découvrir le cockpit. Un habitacle saisissant dans lequel s’est gaillardement glissé notre Premier ministre, sous l’œil attentif des caméras. Moins académique fut sa sortie contrariée par l’embonpoint de l’apprenti pilote en chasse des ressources financières du pays. Peut-être était-il simplement épuisé par l’échec de quatre mois de conclave sur les retraites, « un travail remarquable » marqué par des « avancées », mais pas d’accord. Pour François Bayrou, la voie de passage est décidément très étroite.

Georges Chabrier

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