C’est toujours pareil. Quand elle ne nous concerne pas, la justice est régulièrement appréciée pour respecter les droits fondamentaux de chacun. D’autant plus d’ailleurs lorsque l’on gagne le procès. Pilier de l’État de droit auquel se réfèrent ostensiblement nos grands élus dans l’expression convaincante de leurs mandats, elle perd de son lustre dès lors que l’un d’eux encourt ses injustes sanctions. Pire encore, elle devient une forme endimanchée de la vengeance, la vendetta des jaloux, des briseurs de carrière, le bras armé de vilains juges, partiaux et politisés. Pourtant, ô combien ils les vénèrent, leur État de droit et leur justice. « J’ai vraiment confiance dans la justice (…) Au risque d’être mal compris, je dirais même que j’ai confiance en elle car je n’en ai pas peur. » « L’État de droit, c’est la soumission de tous aux règles démocratiquement définies, et c’est l’une des immenses conquêtes de la civilisation européenne », tonitruaient respectivement Nicolas Sarkozy et Marine Le Pen, dans un temps rêvé de probité judiciaire. Aujourd’hui l’un et l’autre s’accordent pour fustiger la légitimité de l’institution qui vient de condamner l’ancien président de la République à connaître l’humiliant privilège de dormir en prison.
Drôle de camarade
Les deux belligérants entrés en guerre pour dénoncer un « coup d’État » de la magistrature ont trouvé un public, mobilisé leurs familles, de sang et d’idéologie et, çà et là, quelques pairs solidaires parfois titillés par les juridictions. À contre-courant de ses partenaires du Nouveau Front populaire, un certain Jean-Luc Mélenchon a estimé que « la décision de destituer un élu devrait revenir au peuple. » Une captieuse manière d’exprimer sa camaraderie, violemment blâmée dans les colonnes du Monde par les dissidents LFIstes jugeant que leur ex-leader « met en opposition les juges et le peuple, ce qui est un narratif d’extrême droite et de la droite affairiste. » Un récit banalisé, voire institutionnalisé par Donald Trump imposant la grâce des insurgés du Capitole cyniquement et abusivement condamnés par la Justice américaine pour avoir soutenu leur champion ! Un procès en destitution du chef MAGA a été engagé pour « incitation à l’insurrection contre le gouvernement des États-Unis ». Trump a été acquitté. À bon droit pour les uns, ou indûment pour les autres, la justice est passée. Pour Nicolas Sarkozy, il en est ainsi, comme l’explique sereinement Clément Viktorovitch (voir ci-dessous), pour alerter sur le danger des dérives autoritaires engendrées par les saillies médiatiques récurrentes contre l’État de droit.
Georges Chabrier
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