Ils, elles sont passé(e)s par Saumur. Chronique de Gino Blandin : Jeanne Delanoue « La servante des pauvres »

Cette rubrique bimensuelle, orchestrée par Gino Blandin, auteur saumurois et ancien président de la Société des Lettres de Saumur, se propose de brosser le portrait des personnalités qui, au fil du temps, sont venues à Saumur au cours de leur existence. Aujourd’hui, Jeanne Delanoue « La servante des pauvres » (1666-1736).

Jeanne Delanoue voit le jour à Saumur le 18 juin 1666. Ses parents tiennent un magasin de mercerie dans le quartier de Fenêt. Sa biographe, Marie Laigle, la décrit ainsi : « Elle n’était pas grande, mais d’une taille médiocre ; et elle avait un visage carré et plein, un peu marqué de vérette (varicelle) des yeux vifs et à fleur de peau… ». Quand sa mère décède, elle prend le commerce en charge. Elle a alors 26 ans. On la dit avare. C’est l’année suivante, en 1693, émue par la pauvreté qui règne dans la ville, qu’elle a la révélation et décide de se consacrer à l’assistance des plus démunis. A cette époque, le roi Louis XIV est fort incommodé par la pauvreté qui s’affiche partout dans les rues. En 1662, il  rend une ordonnance enjoignant à toutes les villes importantes du royaume de créer à leurs frais un Hôpital général,  « pour y loger, enfermer et nourrir les pauvres mendians, invalides, natifs des lieux ou qui y auront demeuré pendans un an, comme aussi les enfans orphelins ou nés de parents mandians ». A Saumur, l’ordonnance ne déclenche pas un grand enthousiasme. Il faut attendre dix-sept ans avant de voir une proposition de Thomas Hue. Celui-ci suggère de construire un bâtiment sur la lande sablonneuse du Chardonnet, mais la municipalité ne parvient pas à s’entendre sur le financement du projet. Une trentaine d’années plus tard, on en présentera un autre qui n’aura pas plus de succès.

Jeanne Delanoue, par son action, évite à la ville de faire les frais d’un nouvel hôpital. Elle remplit en partie la fonction qu’il devait rendre. Au Fenêt, chez elle et avec d’autres femmes, elles accueillent tous les réprouvés qu’elles peuvent. Le 3 juillet 1703, une partie du coteau s’effondre détruisant leur maison et tuant plusieurs personnes. Aujourd’hui, une rue conserve le souvenir de cette catastrophe : la rue des Fondis, c’est-à-dire la rue de l’éboulement.  Célestin Port raconte que Jeanne Delanoue trouva alors refuge chez les Oratoriens, mais Marie Laigle n’offre pas le même récit. Quelques années plus tard, Jeanne créée la communauté des sœurs de Sainte Anne. Dans un souci d’expiation, elle s’autoflagelle à un point tel que Louis-Marie Grignon de Montfort de passage à Saumur, impressionné, lui intime de cesser avant de revenir sur ses paroles après une nuit de méditation sur la question. Par la suite, il semble que de riches donateurs améliorent les conditions d’hébergement de la communauté. En 1716, le chevalier de la Félonnière lui donne l’hôtel des Trois anges dont on peut toujours admirer la façade aujourd’hui.

Jeanne Delanoue décède le 17 août 1736 à l’âge de 70 ans. Elle laisse à sa mort une douzaine de communautés. Ses restes sont d’abord inhumés dans le cimetière de la congrégation, puis dans la chapelle de Notre-Dame des Ardilliers, avant d’être transférés dans la chapelle de la maison-mère à Saint-Hilaire Saint-Florent. A noter que dans la rotonde des Ardilliers, la chapelle dédiée à Jeanne Delanoue était à l’origine celle de madame de Montespan, maîtresse de Louis XIV, qui l’avait financée. Ses armes figurent sur le piédestal des pilastres. Le 31 octobre 1982, le pape Jean-Paul II prononce la canonisation de Jeanne Delanoue. On la fête le 17 août. Aujourd’hui, les Servantes des pauvres de Jeanne Delanoue, comme on les nomme dorénavant,  se consacrent à ‘éducation, à l’aide sociale et à la santé. Elles comptent environ 400 religieuses, en France, à Madagascar et en Indonésie. La maison-mère est à Saint-Hilaire Saint-Florent. Dans le Maine-et-Loire, de nombreux lieux et bâtiments portent le nom de Jeanne Delanoue.

Bibliographie :
– LAIGLE Marie, La Mère des pauvres, Jeanne Delanoue, 1666-1736, La Congrégation des Sœurs de Jeanne Delanoue, Saint-Hilaire-Saint-Florent, 1968.
– PORT Célestin, Dictionnaire historique, géographique et biographique de Maine & Loire, Editions Siraudeau, Angers, 1965.

 

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