Jeudi 26 juin
Une pré-inauguration avait lieu au Cinéma Le Cornay, à Loudun, en présence de Monsieur Ducrot, adjoint à la culture. Le film présenté, en rapport avec le thème du festival, PEUPLES RACINES, était Abyssinie, Ethiopie, la piste des origines. Les pistes et les chemins de l’Abyssinie et de l’Ethiopie actuelle parcourent des vallées et des montagnes où l’humanité et ses grandes civilisations plongent leurs racines les plus profondes depuis les premiers pas de Lucy, il y a 3 millions d’années, jusqu’à nos jours. Patrick Bernard et Ken Ung, les réalisateurs de ce film et les créateurs du Festival, ont entraîné son public sur les pistes de ses origines, dans les pas d’Arthur Rimbaud, l’homme aux semelles de vent, à la découverte de ce pays, véritable sanctuaire de l’Humanité et de ses peuples fascinants. A travers le quotidien des familles, à travers des paysages et des sites à couper le souffle, ce film a invité le public à vivre les pâques orthodoxes des Chrétiens d’Ethiopie, à rencontrer les descendants des Juifs Falashas, à découvrir Harrar -la ville sainte de l’Islam-, à comprendre la riche culture des peuples des montagnes du nord et de l’est sur les sentiers des grands royaumes de l’Abyssinie et à partir à la rencontre des tribus les plus reculées de la basse vallée de l’Omo et de leurs étonnants rites de passage aux confins de l’Ethiopie, du Kenya et du Soudan.
Vendredi 27 juin
Monsieur Marc Bonnin, Maire de Montreuil-Bellay, prend la parole au moment de l’inauguration ; son discours ayant été apprécié de tous, en voici, avec son approbation, quelques morceaux choisis qui introduisent parfaitement le but de ce festival qui est « bien plus qu’un simple festival, c’est un voyage au coeur de l’humanité, qui nous révèle la diversité des peuples et des cultures. Dans un temps où l’uniformisation, la standardisation, la simplification menacent la richesse de nos différences, les films (…) proposés deviennent des outils essentiels de mémoire, de transmission mais aussi de réflexion. (…) Le festival Anako valorise ces multiples regards et aussi des réalités parfois oubliées, voire même menacées. (…) Devenons l’espace de quelques jours « ethnologue » pour nous dire que la découverte de la diversité humaine n’est pas un simple constat, c’est une invitation à élargir notre regard, à repenser nos certitudes et à reconnaître que la différence est une chance ; une chance de mieux nous comprendre nous-mêmes à travers les autres et de construire un avenir commun plus ouvert et plus solidaire ». Le film, Peuples racines, les renouveaux indigènes, était projeté dans la salle de la Closerie de Montreuil-Bellay, et un débat a suivi avec l’Association I.C.R.A. International et Patrick Bernard. Deux heures plus tard, un nouveau film, y était projeté : Le nouveau chamane de la forêt des esprits, avec l’Equipe Anako Mentawai. Une visite guidée des deux expositions sises dans le jardin de l’ancien couvent des Augustins de Montreuil-Bellay a suivi : la première, Habitats nomades, sous la guidance de Patrick Bernard, a fait découvrir au public fort intéressé, une roulotte tsigane des années cinquante, récemment restaurée, provenant des ateliers LASNEAU de Tours, une khaïma ou tente berbère utilisée par les nomades dans les zones désertiques et arides de l’Afrique, une yourte ou ger, la tente circulaire des nomades de Mongolie, et un tipi du Peuple amérindien Déné du grand nord canadien. La seconde exposition, nommée Double « JE », d’une rive à l’autre, installée sur les murailles médiévales de la ville et toujours sous la guidance de la jeune amérindienne wayana, Leenu Panapassi et de Patrick Bernard, montre les photographies de Miquel Dewever-Plana qui nous révèlent, à 7 000 km de la métropole, la réalité méconnue des peuples premiers de la forêt guyanaise, en Amazonie française. Les jeunes Amérindiens sont photographiés en tenue traditionnelle et, parallèlement, en tenue actuelle. C’est le choc des cultures. Ces 42 doubles-portraits dressent une chronique intime et contemporaine ; ils mettent en lumière le combat de ces femmes et de ces hommes pour exister et se réinventer malgré les injonctions stéréotypées d’un monde en voie de globalisation sur le modèle consumériste dominant. Ces deux expositions sont à découvrir dans le jardin de cet ancien couvent jusqu’au 14 Juillet. Abdoul Aziz Deme, alias Massa Deme, descendant d’une grande lignée de griots burkinabés, fait partie des artistes reconnus au Burkina Faso, multi-récompensé. Chanteur et guitariste, il a proposé ses textes engagés sur les conditions de vie de son pays, comme le mariage forcé, la méchanceté humaine, mais aussi l’amitié. Il a enchanté le public. La projection du film de Pierre Lane, Antécume Pata, un village Wayana, a eu lieu en plein air, sur les murs du couvent des Augustins. Ce film révèle le symbole de la lutte des Amérindiens pour la préservation de leur culture et de leurs droits : situé sur une île, à trois heures de pirogue au sud de Maripasoula, sur le Haut-Maroni, au sud-ouest de la Guyane, près de la frontière avec le Surinam, Antecume Pata est un village habité par 400 Wayana. Un ouvrier lyonnais, André Cognat, a intégré cette communauté en 1961 et y a fondé une famille. Ce qui a été le plus émouvant, pour le public, c’est la présence de la fille d’André Cognat, Kulilu, qui a participé, depuis la Guyane, grâce à la modernité de la téléphonie, au film puis au débat ! Sa nièce, Leelu Panapassi, était aussi présente et toutes deux ont pu narrer le basculement d’un mode de vie traditionnel au déracinement culturel imposé par le modèle post-colonial de la société guyanaise et évoquer les problèmes des jeunes Wayana, victimes de harcèlement, qui ne savent se positionner et finissent par se suicider. Moment intense pour le public qui a eu bien des difficultés à poser des questions…
Samedi 28 juin
Les films projetés dans la salle de la Closerie, à Montreuil-Bellay, étaient Mémoires d’Océanie, Le rêve brisé des Aborigènes, un témoignage de deux des pionniers de l’exploration ethnographique, Betty et Jacques Villeminot, suivi d’un débat avec Martine et Spencer Brown, spécialistes de l’Australie, et Yanomami, les voix de la forêt, de Emmanuel Oger. Dès 20h30 en ouverture de la grande soirée consacrée à la vie nomade en Mongolie, le film Mongolie, les fils du vent. Le public, très nombreux, est parti à la découverte des Mongols, ces nomades qui, avec leurs rennes ou leurs chevaux, parcourent les steppes, les taïgas et les déserts au rythme des vents et des saisons. Patrick Bernard, le réalisateur de ce film, ne dit-il pas « Pour entendre la Mongolie, il faut juste s’incliner devant la nature divine et se fondre avec l’esprit du vent » ? C’est pourquoi, à la suite de son film, Patrick Bernard a convié le public à un concert du groupe ARGUSAN, remarqué dans l’émission « La France a un incroyable talent » ; ces deux musiciens jouant de la vièle à tête de cheval et cette musicienne avec sa harpe mongole, ont fait vibrer, à travers leur chant diphonique Khöömii, l’âme des grands nomades de Mongolie, le galop des chevaux ou le souffle du vent dans les steppes et les taïgas. Le khöömii, né de l’imitation des sons de la nature, est basé sur un son fondamental nommé bourdon, produit par le larynx, sur lequel, grâce à un placement des lèvres ou de la langue, des harmoniques viennent s’ajouter en formant une mélodie, à deux voix (ou plus). Splendide moment musical apprécié de tous mais, en dépit de quelques essais, il a été impossible aux personnes présentes d’imiter ce chant mongol ce qui a bien amusé nos trois musiciens-chanteurs !
Dimanche 29 juin
Le film présenté dans la salle de la Closerie de Montreuil-Bellay, ce matin-là, est Yintah, la lutte des Wet’suwet’en. Yintah signifie « terre ». Les Wetʼsuwetʼen vivent en territoire autochtone, non cédé au Canada, depuis des milliers d’années. Or, un projet faramineux de gazoduc projette de traverser leurs terres ancestrales. S’engage alors une lutte effrénée pour faire face aux appétits des entreprises et au harcèlement de la Gendarmerie Royale Canadienne. Plongée au cœur du combat de la nation Wet’suwet’en, ce film, tourné sur plus de dix ans, suit deux Amérindiennes qui se battent afin que leur nation réoccupe ses terres ancestrales, qu’elle résiste à la construction de plusieurs pipelines et les protège contre plusieurs des plus grandes sociétés d’énergie fossile du monde. Le débat qui a suivi a été assuré par la section loudunaise d’Amnesty International. Une pétition a été signée afin que les poursuites engagées contre ce peuple soient abandonnées. Le public s’est ensuite déplacé à Saumur, au château-musée de la reine de Sicile, où Patrick Bernard a assuré la visite des expositions de cet ethno-musée. Le public a pris connaissance des chasseurs-cueilleurs itinérants, des agriculteurs semi-nomades ou sédentaires, puis des éleveurs nomades que sont les derniers « Humains véritables ». Les visiteurs ont parcouru en un peu plus de deux heures l’Amazonie, l’Indonésie, la Mongolie, l’Australie et l’Afrique : belle performance ! Le château-musée de la reine de Sicile est ce lieu emblématique de la ville de Saumur, que nous vous invitons à visiter pendant vos prochaines vacances, du vendredi au lundi, avec une visite guidée le dimanche, à 15 heures, par le fondateur, Patrick Bernard. Le public a pu y admirer les structures mobiles en osier de l’artiste local, François Chauvin. Ces étonnantes structures aériennes en osier répondent aux techniques ancestrales des peuples premiers qui s’expriment à travers leurs outils du quotidien, leurs masques cérémonials et leurs objets rituels. Ces structures mobiles sont en vente au château de la reine de Sicile. Un film de et avec Jean-Pierre Valentin a ensuite été présenté. Il s’agit de Berbères du Haut-Atlas, les Aït Atta. Au cours de nombreux séjours dans le Haut-Atlas, au Maroc, ce réalisateur a parcouru le cœur du haut massif, arpenté les sentes muletières, fréquenté les hameaux reculés et les tentes noires des nomades. Aujourd’hui, le Haut Atlas a changé : des pistes goudronnées, une modernité qui chahute la coutume… Mais la tradition des gens des hauteurs, les berbères Aït Atta, est puissante et, si la télévision, la gazinière ou la machine à laver bouleversent un certain ordre des choses, elles ne parviennent pas encore à bousculer un quotidien d’entraide et de solidarité. Les nomades Aït Atta passent l’été sur les estives où leurs troupeaux profitent des alpages et des torrents. Une vie rude mais appréciée des aînés qui connaissent le Haut Atlas et ses parcours depuis des siècles. Mais il est possible de se demander ce que feront les nouvelles générations… Ainsi que vous venez de le constater, le Festival Anako du film ethnographique est une succession de projections de films d’auteurs de qualité, accompagnés de débats passionnants, mais aussi des expositions et une grande soirée spectacle le samedi soir dans des lieux prestigieux. Afin de ne pas manquer le prochain festival qui, en 2026, aura pour thème « les peuples voyageurs », notez qu’il a toujours lieu la dernière semaine de juin, dans la région saumuroise, montreillaise et loudunaise. Nous vous y attendons l’année prochaine.
Infos pratiques : Pour plus d’informations : www.fondation-anako.org. Le film-annonce du 11° Festival est encore à votre disposition : https://vimeo.com/manage/videos/1076328374/4869fda29b.
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