Dossier. Il y a 79 ans, un 21 avril, les femmes obtenaient le droit de vote !

En France, il a fallu attendre le 21 avril 1944 pour que les femmes obtiennent le droit de voter et de se présenter à une élection. Revenons sur l’histoire de ces milliers de suffragettes qui se sont battues pour que les femmes d’aujourd’hui puissent exprimer leur voix dans les urnes, mais également en tant qu’élues. Retour sur l'histoire de combat pour l'égalité.

En France, le suffrage est rendu universel en 1848. Pourtant, il ne concerne pas les femmes, qui doivent attendre 1944 pour obtenir le droit de vote et d’éligibilité. L’ordonnance du 21 avril 1944 fête aujourd’hui ses 79 ans. L’article 17 de cette ordonnance relative à l’organisation des pouvoirs publics donne le droit de vote aux françaises et les rend éligibles. Grâce à ce texte, les françaises ont pu voter pour la première fois aux élections municipales de 1945, 16 femmes ont également pu siéger comme déléguées aux Assemblées Consultatives Provisoires à Alger et 33 femmes ont pu devenir députées à l’issue des élections législatives du 21 octobres 1945.

Tout début au 18e siècle

La revendication du droit de vote pour les femmes date de la Révolution française, au moment où le suffrage censitaire masculin est mis en place. Très tôt, des figures tentent de s’imposer, comme Condorcet ou Olympe de Gouges, qui défendent les droits politiques des femmes au nom de l’égalité de tous les citoyens. Pourtant, les luttes pour l’universalisation du vote laissent longtemps les femmes de côté. À la suite de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen qui attribue notamment le droit de vote aux hommes, Olympes De Gouges a rédigé en septembre 1791 la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne. Elle est la première à demander l’égalité des droits civiques entre les femmes et les hommes. C’est finalement le combat civique des femmes dans la résistance pendant la seconde guerre mondiale qui a servi au mieux l’égalité des droits.

1944

En effet, la question du vote des femmes est posée en mars 1944 par le député Fernand Grenier. En s’appuyant sur les déclarations du Général de Gaulle pendant la seconde guerre mondiale, le député souhaitait que l’Assemblée Consultative reconnaisse le droit de vote et d’éligibilité des femmes « afin que nous lui manifestions notre solidarité et notre volonté de ne plus la traiter en mineure, en inférieure. » Beaucoup ont tenté de faire obstacle au droit de vote et d’éligibilité des femmes. D’autres personnalités ont permis de contrebalancer ces résistances. L’amendement sur le droit de vote et l’éligibilité a été défendu par le député Grenier et son article 16 a été adopté le 24 mars 1944 à la majorité de 51 voix contre 16 sur 67 votants. Il est devenu l’article 17 de l’ordonnance du 21 avril 1944 signée par De Gaulle.

Les suffragettes

Pour redécouvrir cette histoire, l’organisation non gouvernementale « A voté » a mis en place un site dédié où l’on peu retrouver quelques portraits intéressants de suffragettes : https://www.les-suffragettes.fr. A Voté est une ONG française, indépendante et apartisane, qui défend les droits civiques et le progrès démocratique. Ses bénévoles se mobilisent pour lever les freins à la participation électorale. Pour rappel, les suffragettes, ce sont ces femmes qui se sont battues durant de longues années pour obtenir ce droit de vote. « Le mouvement des suffragettes françaises a duré près de 150 ans et pourtant, notre mémoire collective oublie trop souvent ses héroïnes. L’anniversaire du droit de vote et d’éligibilité des femmes est l’occasion de leur rendre hommage et de vous en dire un peu plus sur leur mobilisation », indique l’ONG. Elle présente notamment le portrait de 5 femmes, même si « elles étaient évidemment des milliers à avoir milité et avoir permis l’évolution de notre société ! »

Marie Denizard (3 avril 1872 – 21 mai 1959) : « Pétition, manifestation, Marie Denizard milite pour que les femmes soient dispensées de taxes et d’impôts tant qu’elles seront privées de tout droit politique, car les femmes « n’ont pas à subir les lois ni payer les impôts qu’elles n’ont pas consentis ». En 1912, un journaliste explique que les aspirations des femmes politiciennes ne peuvent recueillir l’assentiment de la souveraineté populaire car aucune d’entre elles n’est candidate. En réponse, Marie Denizard relève le défi et devient la première femme française à candidater à une élection présidentielle. Inspirée du mouvement des suffragettes anglo-saxonnes, elle mène campagne à l’occasion du scrutin du 17 janvier 1913 et va jusqu’à imprimer des bulletins de vote à son nom. »

Hubertine Auclert (10 avril 1848 – 8 avril 1914) : « Hubertine Auclert a consacré sa vie à l’égalité complète entre les femmes et les hommes sans pouvoir la connaître de son vivant. Elle est aujourd’hui considérée comme une figure centrale dans l’histoire du mouvement des droits des Françaises. À son époque, elle innove en réclamant la féminisation de certains mots (témoin, avocat, électeur, député, etc.). Alors que le mouvement féministe de l’époque lutte pour libérer les femmes de l’autorité des hommes dans la famille, Hubertine Auclert pense que leur présence à l’Assemblée leur permettra de résoudre ces problèmes en votant les lois elles-même. Pour médiatiser son combat pour le droit de vote et d’éligibilité, elle se présente, en 1910, avec Marguerite Durand, comme candidate aux élections législatives, suscitant une large couverture des médias. »

Louise Weiss (25 janvier 1893 – 26 mai 1983) : « Journaliste, agrégée de lettres, responsable associative et femme politique, Louise Weiss a consacré sa vie à deux combats : la paix et la construction européenne ainsi que le féminisme. Activiste de la lutte pour le droit de voter et d’être élue, elle est candidate symbolique aux élections municipales de Montmartre en mai 1935 et transforme des cartons à chapeaux en urnes pour recueillir 18 000 bulletins en sa faveur. L’année suivante elle se présente aux élections législatives à Paris et continue de mener des actions spectaculaires et ironiques pour attirer l’attention de la presse : lâcher de ballons transportant des tracts pendant la coupe de France de football, manifestation sur la piste du Grand Prix de Longchamp… On dit qu’elle aurait refusé d’intégrer le gouvernement Blum en répondant « j’ai lutté pour être élue, pas pour être nommée ». En 1979, pour la première élection au suffrage direct du Parlement européen, elle est élue eurodéputée. Doyenne du Parlement européen, elle prononcera, à 86 ans, un discours d’ouverture qui restera gravé dans l’histoire. »

Madeleine Pelletier (18 mai 1874 – 29 décembre 1939) : « Première femme médecin diplomée en psychiatrie de France, Madeleine Pelletier est considérée comme l’une des féministes les plus radicales de son époque. Via ses écrits et ses actions, elle réclame une égalité complète entre les deux sexes, prône le service militaire pour les femmes, défend le droit à l’avortement et veut détruire l’institution du mariage et de la famille. Elle est l’une des premières à parler de la notion de genre. Convaincue que l’émancipation des femmes passera également par le costume, elle porte des cheveux courts et s’habille comme un homme. Grande défenseuse du droit de vote des femmes, elle se présente comme candidate aux élections législatives et municipales de 1910. »

Marguerite Durand (24 janvier 1864 – 16 mars 1936) : « Journaliste, actrice et femme politique, Marguerite Durand défend ses idées féministes à travers les journaux qu’elle créée, notamment : La Fronde et Les Nouvelles. Parmi ses nombreux combats, elle s’investit dans la campagne pour le vote des femmes et défend le droit d’élire et d’être élues. En vue des élections législatives de 1910, elle lance l’idée d’organiser des candidatures féministes aux élections législatives de 1910 et présente la sienne dans le 9e arrondissement de Paris. Celle-ci est toutefois , qui est rejetée par le préfet de la Seine. »

Et aujourd’hui ? « le combat continue ! »

Depuis 1944, de nombreux combats ont été menés pour permettre aux femmes d’être mieux entendues au sein de la société. Par exemple, la loi du 4 août 2014 sur l’égalité réelle entre les femmes et les hommes a introduit un grand nombre de dispositifs pour combattre les inégalités dans les sphères privée, professionnelle et publique. « Aujourd’hui encore, que ce soit en entreprise, en politique, dans les médias… le combat continue pour que les femmes soient représentées de manière plus juste et équitable ! Faire progresser les droits civiques et politiques des femmes en 2023, c’est se saisir de chaque opportunité où l’on peut faire entendre sa voix… », indique l’ONG A Voté. Elle précise aussi que cela passe notamment, directement par les urnes. « Au premier tour de l’élection présidentielle de 2022, six abstentionnistes sur dix étaient des femmes. Pour faire progresser l’égalité entre les femmes et les hommes, chaque voix compte, le combat continue dans les urnes ! » tout en rappelant que « le prochain scrutin aura lieu en mai 2024 à l’occasion des élections européennes. »

Petit bonus

Le site Les Suffragettes met également en exergue quelques verbatims. Si elles peuvent sembler choquantes aujourd’hui, ces citations ont bien été prononcée en leur temps par des élus (hommes évidemment). Florilège :
« Plus que pour manier le bulletin de vote, les mains de femmes sont faites pour être b…sées. » Un élu en 1919
« En majorité, les femmes qui réclament le suffrage universel savent tout faire, sauf une chose : les enfants. » Un élu en 1922
« Donner le droit de vote aux femmes, c’est l’aventure, le saut dans l’inconnu, et nous avons le devoir de ne pas nous précipiter dans cette aventure. » Un élu en 1932

Pour aller plus loin : Retrouver la chronologie du droit de vote et d’éligibilité des femmes sur https://www2.assemblee-nationale.fr/decouvrir-l-assemblee/histoire/le-suffrage-universel/la-conquete-de-la-citoyennete-politique-des-femmes/chronologie-du-droit-de-vote-et-d-eligibilite-des-femmes. Retrouvez également toute l’histoire en détail sur ce lien et sur le site https://www.les-suffragettes.fr.

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