Edito du kiosque : Instruction civique : la fable de la semaine

Au jeu de l’arlésienne, l’instruction civique est une inspiration. Depuis la nuit des temps, les gouvernements claironnent sur l’impérieuse nécessité de transmettre les valeurs qui cimentent nos sociétés. Du geste à la parole, il y a un pas que nos élus peinent misérablement à franchir.

Il espérait bien plus. Mais las, il n’a pas fait exploser l’audimat des chaînes cumulées. En forme olympique, notre Président a pourtant maîtrisé son marathon médiatique en deux heures et quinze minutes, soit une performance honorable et rarissime dans la pratique présidentielle des confrontations directes ou détournées avec les masses citoyennes. Dans un décorum élyséen empreint d’or et de solennité, il a sereinement égrené le chapelet de ses prouesses, de ses promesses à faire mieux, plus vite et plus simplement, mais dans l’ordre et l’autorité. Un paradigme qu’il entend généraliser, notamment dans l’éducation nationale, sous l’autorité confirmée de sa ministre, Amélie Oudéa-Castéra, dont le cahier de devoirs est ponctué de trois signets fluorescents quelque peu marginaux dans l’épaisseur de l’ouvrage à refondre. En premier lieu, décider ou non de valider le test d’un nouveau sarrau, tenue unique boutonnée dans le dos que portaient les élèves de Jules Ferry. Sans les trois bandes et sans virgules, les élèves pourraient tôt se retrouver en uniforme par souci d’égalité et de fraternité. Gabriel Attal avait autoritairement interdit l’abaya, elle, devra attendre l’analyse des tests effectués dans les établissements volontaires pour consacrer le « dress code » de nos jeunes apprenants. Nous patienterons donc pour connaître le verdict des cours et des préaux et, avec grand intérêt, les propositions visant à réguler l’usage des écrans dans le milieu scolaire.

Le rat, l’huître, le lièvre et le corbeau….

Noble tâche, tant l’impact de cette addiction peut s’avérer nuisible à la bonne santé physique et mentale des élèves. Peut-être faudrait-il plus sûrement les accompagner pour appréhender une utilisation rationnelle et pertinente de l’information contenue. Le troisième signet ne souffre aucun délai étant inhérent à une obligation efficiente depuis… 1882 et l’introduction de l’instruction morale et civique à l’école primaire en lieu et place de l’instruction morale et religieuse. Au jeu de l’arlésienne, l’instruction civique est donc la référence absolue, la patate chaude que les gouvernements successifs s’emploient à refonder avec une conviction de cagot. Or, la matière est une discipline à part entière, née d’une volonté politique soutenue par l’exigence des transmissions de valeurs morales et civiques. Comme hier, donc, « Il a été décidé qu’on reparlerait, dès les petites classes, d’éducation civique, d’honnêteté, de courage, de refus du racisme et d’amour de la République » disait André Frossard. « Il est dommage que l’école ne soit fréquentée que par les enfants », ajoutait-il aussitôt pour fustiger ceux qui font la morale, sans trop de civisme. Le Président a répété qu’il était important d’apprendre et chanter la Marseillaise. Il serait aussi pertinent de reparler, pourquoi pas, du loup et du chien, du rat et de l’huître, du renard et du corbeau, du lièvre et de la tortue, autant de fables éclairées et délicieuses évoquant la liberté individuelle, la patience, la sagesse, le respect, l’honnêteté, la solidarité, la tolérance, l’injustice et même le travail… Merci Jean de La Fontaine.

Georges Chabrier

Commentaires 2

  1. Uncle Jack says:

    Bonsoir, merci de votre humour, sur un sujet grave.
    Est-il compliqué de traduire la constitution, les droits de l’homme ? Et oser écarter les religions qui ont des valeurs complémentaires est-ce difficile où nous manquons d’une sorte de résumé pour les valeurs communes, ou sont-elles mal partagées à voir certains débats politiques, ou de société
    Vaste programme pour nos enseignants !

  2. Jean says:

    Les Fables de la Fontaine sont un bon exemple d’éducation de base , à condition de bien les choisir…

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