Histoire locale. Les combats de Saumur : 19 juin 1940 – 21 juin 1940

Alors que le dernier des cadets de Saumur, Yves Raynaud, vient de s'éteindre à l'âge vénérable de 104 ans, la rédaction du Kiosque a décidé de revenir sur ces combats de Saumur de juin 1940.

À compter du 9 juin 1940, face à l’offensive allemande, les armées françaises se replient. Le 17 juin, les français sont derrière la Loire. C’est ce même jour que le lieutenant-colonel MICHON, commandant l’école militaire et d’application de la cavalerie et du train*, créée en 1771 à Saumur, reçoit l’ordre de défendre la ville. Les 786 élèves-aspirants de réserve (EAR), encadrés par leurs officiers et leurs sous-officiers doivent tenir une ligne de 40 kilomètres allant de Montsoreau au Thoureil comprenant quatre points de franchissement que sont les deux ponts suspendus de Gennes, les deux ponts successifs Napoléon et Cessart, le viaduc du chemin de fer et le pont de Montsoreau. Les combattants de l’école sont notamment renforcés par le 2e bataillon d’élèves-aspirants de l’école militaire d’infanterie et des chars de combat de Saint-Maixent ; un détachement d’élèves aspirants de réserve de l’école d’artillerie de Fontainebleau ; un groupe motorisé; des tirailleurs algériens ; des dragons et des sapeurs, pour un total de 2190 hommes. Ces derniers vont réaliser de nombreux faits d’armes.

Dans la journée du 18 juin, on prépare la défense. Des pièces d’artillerie sont mises en batterie, des emplacements d’armes automatiques et des nids de mitrailleuses sont aménagés le long de la rive et la dynamite est installée sur les ponts. À 21 heures, on signale les allemands à Château-du-Loir qui se dirigent vers Noyant. Les premiers éléments ennemis, des motocyclistes, arrivent au pont Napoléon vers minuit. Les français le font alors sauter aux environs de minuit 20, le pont Montsoreau à 1 heure 55 puis le Viaduc à 3 heures 30. Les premiers combats cessent vers 5 heures du matin le 19 juin. Le pont Cessart saute à 19 heures 30, isolant les français qui s’y trouvent dans l’île d’Offard.

Ce même jour, sur l’île de Montsoreau, s’engage une lutte très sévère, sous les obus allemands tirés depuis Brain-sur-Allonnes. Les attaques de l’ennemi sont successivement repoussées.

Dans le secteur entre Gennes et le Thoureil, la défense est assurée par la compagnie du lieutenant Roimarmier, dont le poste de commandement (PC) se trouve à la villa « Beau-Rivage » ou « Monte-Bello », composée des brigades n°28 (dont fait partie l’EAR Yves Raynaud), 32, 33 et 34 respectivement commandées par les lieutenants Chomat, Dutant, Mauré et Lofficier. Au soir du 18 juin, à 22 heures 15, le ravitaillement en vivres n’arrive pas, alors même que les EAR du train n’ont pas mangé depuis 24 heures. À 20 heures 30, en plus de la nourriture, les munitions viennent à manquer. Subissant une forte préparation d’artillerie allemande, les français font sauter le premier pont de Gennes aux environs de 16 heures le 19 juin et les combats s’engagent vers 21 heures. Ils vont durer jusqu’à 1 heure du matin le 20 juin. Les allemands tentant de franchir le fleuve avec des barques sont repoussés. À 23 heures, le deuxième pont de Gennes saute à son tour. À Saumur même, partiellement en flammes, les bombardements allemands s’intensifient vers 4 heures le 21 juin.

Un peu avant 5 heures, l’offensive générale allemande est lancée. Ils réussissent à prendre pied sur la rive et débordent le dispositif français dont les défenseurs sont épuisés et tenus par la faim. Dans le secteur Gennes – le Thoureil, les allemands pilonnent le PC de la compagnie Roimarmier. Ce dernier fait désormais le coup de feu lui-même fasse à l’ennemi à l’aide de son mousqueton tout en commandant ses hommes, les galvanisant par son exemple. Face à l’avancée des allemands, il donne l’ordre de décrocher. Se repliant vers la route de Coutures par les escaliers quittant le jardin de la villa, le lieutenant Roimarmier est tué par un obus de mortier allemand qui l’atteint à la tête et au bras gauche. Le maréchal des logis-chef Gaillouste est emporté avec lui. La compagnie Roimarmier constituait alors le dernier élément français le plus au nord du dispositif de défense.

À midi dans Saumur, on combat rue par rue. Malgré une contre-attaque à Gennes lancée à 13 heures et qui réussit, aux environs de 15 heures, à reprendre les positions de la matinée et une au centre de Saumur par les cadets de Saint-Maixent, les français sont progressivement isolés et les derniers nids de résistance tombent. On combat encore à la ferme d’Aunis, dernier bastion de la défense française, lorsqu’à 19 heures 30 l’ordre de repli général est donné.

Pour les combats des 19, 20 et 21 juin 1940, l’école militaire et d’application de la cavalerie et du train est citée à l’ordre de l’armée, au prix de nombreux blessés et de trente-neuf morts dont vingt-six cadets, six lieutenants, deux maréchaux des logis et cinq militaires du rang. 12 cadres de l’école et 30 élèves reçoivent la Croix de Guerre. La citation du généralissime Weygand est la suivante : « Sous le commandement du colonel Michon, reflétant l’âme de son chef, l’École militaire et d’application de la Cavalerie et du Train a combattu les 19, 20 et 21 juin 1940, jusqu’à l’extrême limite de ses moyens de combat, éprouvant de lourdes pertes, prodiguant les actes d’héroïsme, et inscrivant dans les fastes de la cavalerie une page digne entre toutes de son glorieux passé. A suscité par sa bravoure l’hommage de son adversaire. »

*Depuis le 9 août 1928, l’arme du Train des équipages est rattachée par décret à la direction de la cavalerie.

Sources :
– Les combats de l’armée française septembre 1939 — juin 1940, Direction de la mémoire, du patrimoine et des archives;
– Milliat R., Le dernier carrousel, Éd. Arthaud, Paris, 1943;
– Chamard E., Les combats de Saumur, Éd. Berger-Levrault, Paris, 1948;
–  Delvolte F., Saumur, Des braises sous la cendre, Éd. Cheminements, Rennes, 2009.

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