Histoire locale. L’hôtel de ville de Saumur : Des décors fastueux (2/2)

Pour ce nouvel épisode de l'histoire locale, le Kiosque s'intéresse à l'histoire de l'hôtel de ville de Saumur. Après un premier épisode la semaine dernière sur la période 14e 19e, voici désormais la suite de l'histoire. Des informations que l'on peut retrouver dans le Focus dédié à l'Hôtel de Ville édité par le service d'art et d'histoire de Saumur.

Pendant le long mandat du Maire Charles Louvet, de 1844 à 1869, d’importants travaux d’équipement de la ville sont entrepris, destinés à donner une image de la cité qui soit à la hauteur de la prestigieuse École de Cavalerie qu’elle abritait en ses murs. L’architecte-voyer Charles Joly-Leterme (1805-1885), par ailleurs architecte des Monuments Historiques et architecte diocésain, est le principal artisan de ces travaux, et son intervention sur l’hôtel de ville est considérable. Celui-ci est trop petit, car il doit aussi abriter la bibliothèque, le musée municipal et la justice
de la Paix. Dès 1841, il construit une aile basse le long de la rue Bonnemère (détruite dans les
années 1980), dans un style néo-gothique précoce, nourri des premières recherches archéologiques sur les édifices médiévaux.

La construction d’une nouvelle aile

Entre 1858 et 1863, il bâtit une aile nouvelle dans le prolongement de l’édifice ancien. Elle contient le bureau du Maire au rez-de-chaussée et, au premier étage la salle des mariages et un salon d’honneur, tous trois accessibles par un escalier monumental donnant sur le porche d’entrée. Principal accès à la cour intérieure, celui-ci est couvert de voûtes d’ogives à liernes et à tiercerons
dont les clés s’ornent des armes des villes sous-préfectures du Maine-et-Loire.

Un décor foisonnant

Pour le traitement des façades de cette extension, Joly-Leterme imite le décor de la façade sur
cour du début du 16e siècle afin d’harmoniser efficacement les deux ailes. Du côté de la cour, celles-ci sont reliées par une tour d’escalier en vis polygonale, tandis qu’une autre tour à l’extrémité ouest du nouveau bâtiment fait écho, avec son damier de brique et pierre, à la vieille tour d’escalier
du 16e siècle. La façade sur la Loire, parfaitement symétrique, est dominée par une imposante lucarne où prend place une horloge : cette lucarne est encadrée de niches où auraient dû prendre
place les statues de saint Louis et d’Henri IV. Il faut prendre le temps d’examiner la sculpture ornementale, où se glissent parfois de facétieux personnages inspirés de l’imagerie médiévale. La ressemblance avec les hôtels de ville du Nord de la France a été soulignée, et parfois reprochée à Charles Joly-Leterme.

Des décors intérieurs fastueux

À l’intérieur, l’architecte invente un répertoire décoratif inspiré du Moyen Âge et de la Renaissance, associant ainsi Saumur à la prestigieuse identité historique du val de Loire.

Le bureau du maire : Le bureau du Maire, au rez-de-chaussée, présente une large cheminée néo-gothique agrémentée d’une riche polychromie. L’entablement est porté par deux dragons, un motif récurrent dans le bestiaire fabuleux choisi par l’architecte : deux autres soutiennent les armes de la ville sur la hotte. Le plafond à solives apparentes est peint, et les hautes portes ornées de motifs en plis de serviette sont couronnées de lancettes trilobées. Le départ de la rampe de l’escalier d’honneur est orné d’un puissant dragon et amorce un garde-corps original constitué de remplages trilobés.

La salle des mariages : Au premier étage, la salle des mariages est un vaste espace dédié aux fêtes, réceptions et cérémonies officielles. Son traitement fut particulièrement soigné : lambris à plis de serviette, portes à lancettes trilobées et quatre grands lustres ornés de têtes de dragons et de couronnes crénelées évoquant les armes de la ville. Les solives apparentes du plafond peint sont portées par deux longues poutres sur lesquelles des « S » majuscules rappellent l’initiale de la ville. L’architecte concentra ses efforts sur la grande cheminée, plus symbolique que pratique. Comme dans le bureau du maire, la hotte arbore un grand blason aux armes de la ville supporté par deux salamandres, emblèmes de François Ier, sous le règne duquel fut terminée la partie ancienne de l’hôtel de ville. L’entablement est porté par deux dragons ; on y voit les armes de villes voisines : Montsoreau, Gennes, le Puy-Notre-Dame (village natal de Charles Louvet), Doué-la-Fontaine et Montreuil-Bellay.

La salle du Conseil Municipal : La salle du Conseil municipal offre le décor le plus spectaculaire de l’ensemble. Installée au premier étage de la partie ancienne de l’édifice, on y accède par un profond couloir aménagé dans l’épaisseur du mur de l’ancien bastion. Le regard est immédiatement attiré par la cheminée au décor polychrome présentant les armes de la ville. Une poutraison colossale divise le plafond en neuf profonds caissons et soutient un lustre monumental accentuant l’aspect solennel de cet espace, cœur de l’activité politique de la ville depuis plus de cinq siècles.

La salle Molière : L’ancien salon d’honneur, aujourd’hui salle Molière, prend place entre l’escalier d’honneur et la cour. L’architecte y propose un foisonnant décor d’esprit clairement Renaissance, concentré ici encore sur la haute cheminée scandée de balustres galbés, de rinceaux et de deux médaillons aux effigies de Louis XII et de François Ier. On retrouve aussi les lambris en plis de serviette, les portes à lancettes et surtout de remarquables décors peints sur les murs et les plafonds, où sont semés des motifs en forme de « S ».

Dans toutes les salles sont exposés des tableaux issus des collections municipales. La partie ancienne de l’hôtel de ville a été classée Monument historique en 1903. L’aile construite au 19e siècle avec l’ensemble de ses décors est inscrite au titre des Monuments Historiques depuis 1995. Au début des années 1980 l’entrée principale de la mairie et de nouveaux bureaux ont été installés dans un immeuble contigu datant du 18e siècle.

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