Histoire locale. Saumur. Retour sur l’histoire du théâtre du Dôme

Situé à la confluence des places commerçantes de la République et de la Bilange, au bord de la Loire maîtrisée, le Théâtre de Saumur s’est toujours voulu depuis le XVIIIème siècle, le symbole de la ville moderne.

La ville de Saumur profite de l’arrivée des brigades de cavalerie en 1763 pour entreprendre sa modernisation. Dans le contexte du vaste plan de réaménagement urbain, la réalisation de la nouvelle salle de spectacle est confiée en 1785 à Alexandre Jean-Baptiste Cailleau déjà chargé de la construction des quais. Il livre en 1788 un premier théâtre à l’emplacement du théâtre actuel, associé à une halle de marché et à une promenade plantée d’arbres sur les nouveaux quais. Le financement est assuré par une tontine de 151 actionnaires (société capitaliste viagère), principalement composée de carabiniers, de notables, d’entrepreneurs et de commerçants de Saumur et des environs. Un négociant d’Angers, Joachim-Jean Trottouin, souscrit même une action sur la tête de Louis Charles de France, le futur Louis XVII ! Très dégradé malgré les restaurations successives, le bâtiment est finalement démoli en 1863.

Un théâtre au style classique mais aux particularités uniques

La construction d’un nouveau théâtre est confiée à l’architecte de la ville, Charles Joly-Leterme (1805-1885). Il opte pour un édifice imposant en tuffeau et en ardoise. La première pierre est posée le 20 juin 1864, en présence des autorités constituées et de Charles Joly-Leterme, architecte de la ville, et auteur des plans. Malgré des difficultés de fondations, les travaux demandent moins de deux ans. Architecte aux goûts éclectiques, Joly-Leterme s’inspire du style de l’époque Louis XVI, contemporaine de la salle qu’il remplace. Les 30 colonnes corinthiennes qui ceinturent le bâtiment témoignent des influences puisées dans les canons de l’architecture classique. Il reprend en effet les colonnades néo-classiques du Grand Théâtre de Bordeaux ou de la Madeleine de Paris. A gauche, la colonnade dominant la Loire présente un effet de fuite plutôt réussi ; en effet, le monument n’est pas rectangulaire, mais se rétrécit vers l’est. A l’intérieur, la salle à l’italienne peut accueillir «860 spectateurs à l’aise, voire 950 un peu gênés». La décoration intérieure est confiée à Antoine-Victor Barbereau dit Saint-Léon, peintre décorateur parisien. Les bombardements de juin 1940 ayant endommagé le théâtre, le décorateur angevin René Rabault réalise un nouveau plafond représentant les allégories de l’Opéra, la Tragédie, la Comédie et la Danse. La salle, s’ouvre sur la place de la Bilange qu’elle domine par ses proportions monumentales. La façade orientale, dédiée aux musiciens et constituant l’entrée des artistes, apparaît comme plus intime. Elle est plus étroite, comportant cinq arcades au lieu de sept. Cette façade a souvent changé d’aspect. La salle est ‘’à l’italienne’’, type de salle à la mode sous le Second Empire. De vastes espaces réceptifs sont prévus : grand escalier donnant sur la place de la Bilange, foyer spacieux au premier étage, large péristyle ouvert à tous, galeries de circulation à l’étage ouvrant sur de nombreuses pièces. Au milieu, la salle de spectacle s’en trouve réduite à un faible espace et tout en hauteur. Le plateau scénique, de bonnes proportions, a été rééquipé à plusieurs reprises. Dans la salle éclatent les rouges et les ors, restaurés en 1963. Les galeries extérieures servent, comme au siècle précédent, de marché couvert et de bourse de commerce (arcades fermées par des portes place de la Bilange).

Le théâtre au XXIe siècle : un important chantier de rénovation et de transformation

Malgré une attention régulière, le théâtre très délabré ferme en juin 2008 pour raisons de sécurité. Les matériaux de structure sont contaminés par des champignons et des insectes et le pavillon central est abîmé par des infiltrations. Le projet de restauration, lancé en 2010 propose une complète modernisation tout en respectant son enveloppe architecturale. Côté salle de spectacle, le plateau et la cage de scène sont modifiés de manière à proposer plusieurs configurations : théâtre, scène circassienne, fosse d’orchestre, gradin pour le lyrique et symphonique, ouverture possible en fond de plateau. Structurellement, la réalisation de planchers intermédiaires permet d’augmenter la surface exploitable et de rendre accessible le toit-terrasse. Dans le Hall d’accueil, la prolongation des escaliers publics à cour et à Jardin en détruisant l’escalier principal rend cet espace libre pour l’accueil et la déambulation du public. Enfin la réalisation d’une toiture en dôme marque extérieurement la transformation du bâtiment. Ce choix architectural n’est pas sans rappeler le style palladien peut-être envisagé par Joly-Leterme… (Andrea Palladio est né à Padoue le 30 novembre 1508 et mort à Vicence le 19 août 1580). Le Théâtre Le Dôme marque l’entrée de la ville côté nord, en lui donnant un contrepoids important au reste des façades sur la Loire. Son nouveau profil caractéristique devient par essence un des bâtiments phare de la Ville avec le dôme des Ardilliers, le château et les 3 flèches de l’église Saint-Pierre, de la mairie ancienne et de l’église Saint Nicolas.

Commentaires 3

  1. ACM49 says:

    Merci pour ces articles très interressants.

  2. Paul Hichinelle says:

    Merci pour ces utiles informations. Le théâtre reconstruit réouvre lors de son inauguration le 5 avril 1866 pour 62 spectacles donnés tout au long de l’année. Gallica (BNF) nous permet d’avoir accès numériquement aux 62 premiers numéros du journal-programme Le Guignol du Théâtre dont les éditos étaient signés par le rédacteur en chef, un certain Paul Hichinelle.

  3. Alain Juret 49400 says:

    Pas un mot sur l explosion du prix des travaux effectués, plusieurs millions d euros de dépassement, pas un mot sur les incidents à répétition et refermeture de deux ans….

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