« Ils, elles sont passé(e)s par Saumur » : la chronique de Gino #17 : La Duchesse de Berry, « L’aristocrate, star et putschiste ratée » (1798-1870)

Cette rubrique bi-mensuelle du dimanche, orchestrée par Gino Blandin, auteur saumurois et président de la Société des Lettres de Saumur, se propose de brosser le portrait des personnalités qui, au fil du temps, sont venues à Saumur au cours de leur existence. Aujourd’hui : La Duchesse de Berry, « L’aristocrate, star et putschiste ratée » (1798-1870)
La Duchesse de Berry en 1825 - Portrait de Thomas Lawrence, château de Versailles

Si la duchesse de Berry n’est pas née à Saumur, elle y a laissé un souvenir ô combien marquant : c’est en son honneur que l’on créa le premier Carrousel !
Marie-Caroline de Bourbon, princesse des Deux-Siciles, naît en 1798 à Caserte, la « Versailles italienne ». Elle appartient à la haute aristocratie européenne. Sa grand-mère maternelle était la sœur de la reine Marie-Antoinette.
A la chute de Napoléon, Louis XVIII a pris les rênes du pays, mais il n’a pas d’enfants, ce qui est fâcheux pour les Bourbons. Il faut impérativement assurer la succession sur le trône de France. C’est dans ce contexte que notre princesse épouse à 18 ans Charles Ferdinand d’Artois, duc de Berry, fils de Charles X, qui succèdera à Louis XVIII.
Les ennemis des Bourbons voient dans ce duc de Berry le dernier membre de la famille. Ils le font assassiner mais échouent dans leur dessein car Marie-Caroline met au monde un garçon : « l’enfant miracle ». Elle va passer le reste de sa vie à intriguer pour restaurer la branche aînée des Bourbons et placer ainsi son fils sur le trône, sous le nom d’Henri V.
C’est dans cette optique, dans le but de ranimer la flamme des provinciaux royalistes, que la duchesse fait un voyage en 1828 dans l’Ouest de la France. Elle arrive à Saumur le vendredi 20 juin. Accueillie par deux escadrons de l’Ecole de cavalerie, elle descend à l’hôtel du Commandement qui se trouve alors à l’actuel n° 55 du quai Mayaud. Les notables de la ville ont prêté des meubles précieux et des tapis afin de rehausser le décor. Dans l’après-midi, elle se rend au Chardonnet par la rue Saint-Nicolas. Elle est reçue par le commandant et installée dans un petit salon « élégamment décoré et dont le balcon donne sur le manège découvert ». Elle assiste alors au premier carrousel. Cette formule a remplacé les tournois moyenâgeux trop violents. La fête est grandiose : 200 musiciens ont été sollicités et l’assistance est estimée à 15 000 visiteurs par le Moniteur universel.
A l’issue de la manifestation, la duchesse visite l’Ecole et dîne ensuite sous la halle de la place Bilange. Revenue à l’hôtel du Commandement, elle salue le peuple et l’on tire un feu d’artifice. Ensuite, elle assiste au bal donné en son honneur dans les salons du premier étage de l’Ecole de cavalerie en présence de 1600 invités. Le lendemain, elle visite le château et assiste à une nouvelle séance du Carrousel. Elle se rend sur le chantier du pont du duc de Bordeaux que nous appelons aujourd’hui le pont des Cadets, puis elle quitte Saumur pour se rendre à Angers. La tradition du Carrousel est née.
Pour Marie-Caroline, la vie politique va être très difficile. Suite à la Révolution de Juillet, elle va suivre Charles X en exil en Angleterre. En 1832, elle fomentera deux coups de force, l’un à Marseille, l’autre en Vendée lesquels seront des échecs cuisants. Elle est à l’origine des derniers soubresauts de l’insurrection vendéenne. Elle est finalement arrêtée à Nantes et conduite en prison. Après quelques mois de détention dans la citadelle de Blaye, elle est expulsée vers l’Italie.
Tenue à l’écart de la famille royale, elle finira ses jours au château de Brunnsee à Mureck en Autriche et mourra le 16 avril 1870. Malgré ses déboires, elle fut une grande mécène, encourageant par ses largesses de nombreux hommes de lettres ainsi que des musiciens parmi lesquels Rossini.

Bibliographie :
– DENECHEAU Joseph-Henri – https://saumur-jadis.pagesperso-orange.fr
– HILLERIN Laure, La Duchesse de Berry : l’oiseau rebelle des Bourbons, Ed. Flammarion, Paris, 2010.

Commentaires 3

  1. Jean says:

    Merci
    Une précision : l’enfant né après la mort de son père a été appelé « enfant « du » miracle » .

  2. PAG says:

    Le « HENRI V », que vous évoquez dans votre article, est-il bien celui qui revendiqua le trône en 1973, mais se « dégonfla » au dernier moment, sous prétexte qu’on lui refusait le remplacement du drapeau tricolore par le drapeau blanc de la monarchie?
    Merci

  3. Christophe Tenaille says:

    Merci pour cet article très intéressant sur un personnage qui aurait pu changer le cours de l’histoire !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Les commentaires sont limités à 500 caractères.
Le Kiosque renforce sa veille : Les commentaires ne seront pas corrigés. Ceux comportant des mots grossiers ou portant atteinte à l'intégrité des individus n'étant pas publics ne seront pas publiés. La courtoisie n'empêche pas la libre expression, nous vous rappelons aussi que le débat s'enrichit d'idées et non de critiques aux personnes. Vous pouvez aussi nous adresser un article, une réflexion, une pensée,... que nous publierons en courrier du lecteur.
Are you sure want to unlock this post?
Unlock left : 0
Are you sure want to cancel subscription?