Le Kézako du Kiosque. Les départements, un drôle de gâteau

Plusieurs facteurs permettent de déterminer l’unité d’un pays. Selon le Larousse, il s’agit “du territoire d’une nation, délimité par des frontières et constituant une unité géographique”. Ceci étant dit, lorsque l’on regarde à quel point certains pays sont étendus, on peut se poser la question de l’organisation de ces derniers : comment s’assurer de l’homogénéité de la représentation de l’État partout ? Les départements, kézako ?
Photo Archives Bibliothèque Nationale de FRance

Avant la Révolution française

L’idée du découpage du territoire français ne date pas d’hier. On en retrouve des traces dès 1665 pour faciliter la gestion fiscale du Royaume. Des essais vont alors se succéder dans diverses régions, notamment en Bretagne, sans pour autant simplifier quoi que ce soit. Pire, cette volonté d’harmonisation se heurte à un obstacle de taille : il existe d’ores et déjà de nombreux découpages inhérents aux Provinces constitutives de la France, culturels, linguistiques, politiques, militaires, religieux. Par le passé, le Pays était un maillage d’identités parfois très fortement marquées, rendant la parcellisation géographique terriblement complexe, voire impossible. C’est en 1788 que Nicolas de Condorcet énonce un principe mathématique pour les futures divisions : le temps de traversée d’un département (“province” en son temps) ne doit pas excéder une journée de cheval en partant de son district (ici, comprendre “agglomération” ou “canton”) le plus éloigné. Une notion articulée autour de la praticité, permettant aux agents publics de couvrir des distances raisonnables, tout en garantissant à chaque territoire nouvellement défini une administration locale. C’est fin 1789 que l’Assemblée constituante (au revoir, Louis) choisit de supprimer les noms de Province, plus assez représentatifs du nouveau maillage, pour adopter une dénomination respectueuse de la géographie (terres et cours d’eau).

Qui peut le plus peut le moins

Les XIXe et XXe siècles ont été politiquement très troublés dans notre pays. Entre les changements de régime, les guerres, les révolutions, les annexions et les amputations, les frontières ont pas mal évolué, ceci ayant eu un impact logique sur le nombre des
départements nationaux. Au plus fort de l’Empire et des guerres napoléoniennes, la France a pu compter jusqu’à 130 départements (notamment en Allemagne, aux Pays-Bas, en Italie ou en Espagne), soit une cinquantaine de plus que les 86 initiaux. N’oublions surtout pas la division de l’Algérie lorsqu’elle était sous contrôle français, puisque ce territoire a été divisé en 3 départements en 1848, mais ce nombre est monté jusqu’à… 17 en 1958. La guerre de 1870 a vu les régions Alsace et Lorraine être délestées d’une partie de leur entité par la Prusse, avant que tout ne soit rétrocédé en 1919 par l’Allemagne défaite. Les départements d’Outre-Mer bénéficient d’un statut un peu particulier compte tenu de leur emplacement et des enjeux qui les concernent spécifiquement, ils possèdent des prérogatives qui dépassent celles des départements de l’Hexagone. Si le maillage n’a plus beaucoup évolué depuis une cinquantaine d’années, on peut malgré tout noter la création en 2011 du 101e département français après un troisième référendum entériné par la population de l’île. Mayotte devient le 5e département d’Outre-Mer de notre pays. Voici quelques noms que vous n’entendrez probablement jamais, perdus dans les méandres de l’Histoire : Méditerranée, Arno ou Taro en Italie ; Mont-Tonnerre, Sarre ou l’Ems-Supérieur en Allemagne ; Zuyderzée, Bouches-de-l’Escaut ou Frise dans les Pays-Bas ; Montserrat, Sègre ou Ter en Espagne ; Constantine, Orléansville ou Oran en Algérie.

L’autorité du département

Couvrant davantage de territoire qu’un chef-lieu ou une commune, mais moins qu’une région, le département est un échelon intermédiaire. Quelles sont, au fond, les compétences dont il dispose ? En soi, nous l’avons vu, son intérêt initial est d’assurer la cohésion territoriale, mais sa première mission demeure de promouvoir la solidarité. C’est pour cela que le département influe sur la gestion de l’enfance, des personnes handicapées et des personnes âgées (aides sociales, mesures d’hébergement). De même, il gère l’eau, la voirie, les collèges (création et entretien), ainsi que les employés du public. Les départements doivent aussi s’assurer de l’accès à la culture et préserver le patrimoine historique. Vous l’aurez compris, les compétences de cette collectivité sont avant tout orientées vers le service, il s’agit d’adapter les ressources de l’État aux besoins spécifiques des territoires et populations qui constituent la magnifique complexité de notre nation. Il est devenu un acteur de proximité essentiel et un interlocuteur privilégié du citoyen.

Commentaires 3

  1. Papyque says:

    L,histoire de la désignation des départements est parfois à mourir de rire. Ainsi la Var ne coule même pas dans le département qui porte son nom. La Vendée a failli s’appeler les deux Lay (imaginez la tête de leurs représentants)avant que l’on trouve trouve un ruisseau qui ne passe que sur 25kms au sud du département.

  2. Papyque says:

    De plus des anciennes localités de Province on été rattachées insidieusement aux alentours, tel que le nord Deux Sèvres, l’ouest de l’Indre et Loire, le nord de la Vienne, les sud Sarthe et Mayenne et surtout La Boissière du Doré qui est une commune Angevine et non bretonne comme l’indique improprement le panneau à l’entrée du village. Et je ne parle que de l’Anjou, je suppose que d’autres régions auraient des perles d’anecdotes sur ce sujet.

  3. Jack says:

    Le Nord de la Vienne n’intéresse pas le Département, et encore moins la Nouvelle Aquitaine !
    Pourquoi pas Maine et Loire, ou Indre et Loire ?

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