L’Edito du Kiosque : L’école en zone rouge

L'éducation nationale est en grande souffrance. Sa qualité se détériore et la transmission du savoir s'étiole. La formation continue du corps enseignant est une priorité absolue pour s'adapter à l'évolution des publics et garantir, à nouveau, l'efficience du système.

En France comme ailleurs dans le monde, le quotient intellectuel est en baisse. De manière plus significative dans les pays occidentaux, en opposition aux contrées asiatiques moins marquées par cet appauvrissement troublant. En causes essentielles à ce délitement collectif émergent la qualité générale de l’éducation, la mutation des médias et l’altération de la santé et de la nutrition. Si l’on considère, sans outrance, que le premier vecteur est en capacité d’influer directement sur les deux autres, il nous faudrait donc stigmatiser le mammouth cher à Claude Allègre, ancien ministre de l’Education nationale, dont l’objectif était de dégraisser la bête et de le débureaucratiser. Vingt-cinq ans plus tard, le mastodonte n’a rien perdu de sa monumentale corpulence, mais il souffre d’une asthénie chronique grave et inquiétante qu’entretiennent les renonciations successives des gardiens du temple. « C’est pas nous, c’est les autres » qui ont laissé notre école en haillons, dépouillée de ses objectifs fondamentaux d’éducation. Certes, elle est toujours gratuite, obligatoire et laïque, comme l’avait souhaité Jules Ferry, mais, aujourd’hui, elle dérive, telle la frégate de la Méduse, ballotée par des tempêtes d’incertitudes. Les enseignants quittent le navire, le niveau des élèves fléchit et la violence s’instille sournoisement et durablement dans des établissements trop souvent vétustes et livrés aux vents de l’absentéisme. Yvan Attal, nouveau ministre, a présenté un budget (le premier de France), en hausse, et tenté de convaincre concomitamment de la nécessité de supprimer des postes (2500), en regard d’une érosion de la démographie. Moins d’élèves, donc moins d’instituteurs ou de professeurs alors même que notre pays s’inquiète, à juste titre, d’un manque manifeste de vocations. Alors même que, chaque jour, des milliers de scolaires patientent désespérément dans des cours ou des couloirs en attendant l’éducateur qui ne viendra pas. Alors même que des professeurs qualifiés sont rémunérés pour rester chez eux, dans l’attente d’une affectation… qui, pas plus, ne viendra. Alors on bricole, comme l’a si bien montré le reportage en immersion et édifiant du magazine « Zone interdite », on colle des emplâtres ici et là, on embauche à la hâte ceux qui lèvent la main pour se porter volontaires et affronter, sans délai et sans formation, nos jeunes apprenants. La vérité est cruelle et la revalorisation contrainte des salaires pour pallier le déclassement des personnels de la profession n’a, en rien, changé le problème de fond qui mine l’institution.

La précarité s’impose

Pire encore, la précarité s’impose en standard de postes de transition, de passage, assignés à des contractuels sans ambitions de carrières longues. De fait, la transmission du savoir s’opère par saccades érosives, destructrices du fil conducteur requis pour assurer la bonne croissance intellectuelle des élèves dans un environnement stable et apaisé. « Ils peuvent oublier ce que vous avez dit, mais ils n’oublieront jamais ce que vous leur avez fait ressentir ». C’est essentiellement là que le bât blesse. Le corps enseignant vacille, malmené par des mesurettes occultantes, inopérantes pour assurer et entretenir le lien de proximité indispensable, l’adhésion, l’envie d’apprendre de tous leurs publics. Pour recouvrer sa performance et ses valeurs, notre service public de l’éducation doit impérativement s’adapter aux mutations constantes de la société, des élèves et donc former, en continu et à l’écoute, tous ceux qui dispensent le savoir. Hisser cette ambition au premier rang des priorités est la seule garantie d’une guérison rapide et durable, de l’apaisement d’une fièvre encore maîtrisée, mais toujours alarmante. A l’exemple du Plan de Rénovation Urbaine, généreux pour embellir les quartiers, sans traitement social approprié des populations, l’Education nationale s’est engagée dans un programme conséquent de l’amélioration des établissements, puisse-telle déployer les mêmes ressources pour enrichir la substantifique moelle de notre avenir. « On peut filmer les prisons, mais pas les écoles » avaient constaté, à leurs dépens, les journalistes d’investigation du documentaire diffusé sur M6. Il est des vérités que l’on préfère encore cacher.

Georges Chabrier

Commentaires 2

  1. Florentais says:

    Bonsoir monsieur CHABRIER. Dite moi je ne comprends pas j ai bien écouté les fans Européens le camps du bien droite et gauche, les syndicats ,les journalistes de gauche qui explique le bon côté a choisir, le budget extensible d année en année. Et toujours les même reportages car c est pas nouveau comme verdict cela dure depuis au moins 25 ans alors…

  2. Cebenvrai says:

    Pourquoi changer de ministre de.l’Education Nationale ? Pourquoi Yvan plutôt que Gabriel ? L’un doit être content de sa nomination, le titulaire ne se laissera pas faire. Depuis mai 68, nos profs et instits tenant de l’instruction ont voulu nous montrer la nouvelle société. Depuis, l’absence de respect et d’autorité, ajoutée à la démission de certains parents, nous mène droit dans le mur. A quand le retour de l’éducation par l’exemple ???

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