Saumur. Entretien avec l’auteur Pierre Creet : « C’est l’humain qui m’intéresse, depuis toujours »

Vous l’avez vu et lu à plusieurs reprises dans les colonnes du Kiosque depuis maintenant quelques années. L’auteur tourangeau Pierre Creet a aujourd’hui à son actif une quinzaine d’ouvrages. Mais avant de s’en aller vivre de l’autre côté de la frontière, en Touraine, il a grandi à Saumur et y a passé les premières années de sa vie. Il a aujourd’hui gardé un pied en terre saumuroise où il revient fréquemment. Rencontre avec cet auteur local, personnalité atypique et « grande gueule au cœur tendre ».

Le Kiosque : Vous avez grandi à Saumur, comment se sont passées ces années et qu’en retirez-vous ?

Pierre Creet : « Je suis né orphelin. J’ai été recueilli et élevé par mes grands-parents maternels et j’ai grandi entre les Ponts dans un immeuble de la place du Port Cigongne. Mes grands-parents étaient assez aisés, mon grand-père était le directeur de la Banque de France de Saumur. Je ne manquais donc de rien sur le plan financier ou autre, ma grand-mère était très généreuse. J’ai vécu une enfance particulièrement heureuse, faite de copains et copines, de bonbons et Mistrals Gagnants que l’on allait chercher à la boulangerie. Je faisais alors du football, de la natation, de l’équitation… J’en garde de bons souvenirs ! L’enfance, c’est l’innocence et je suis un grand innocent ! »

K : Vous êtes passé par quels collèges et lycées de la ville ?

PC : « Comme je le disais, j’ai vécu une enfance heureuse, en fréquentant au minimum les collèges et les lycées. Je suis allé dans plusieurs, les Récollets, la Visitation, Saint-Louis, le lycée d’Etat, et même en internat au collège de Baugé. Malheureusement, ma présence a été courte dans plusieurs établissements d’où j’ai été viré. J’étais un enfant sauvage et je n’arrivais pas à m’intéresser à des choses si strictes que l’enseignement proposé dans nos écoles de la République. J’avais besoin d’évasion, de liberté ! Très tôt, je ne lisais pas les livres proposés par l’enseignement et je faisais mes propres lectures. Je me suis inventé un monde libre. J’ai pu voyager grâce à Hergé et Tintin qui m’emmenaient au bout du monde. Plus tard avec Bob Morane. Il y avait dans ces livres quelque chose de génial, qui j’en suis persuadé m’ont donné l’envie d’écrire, c’était le fait d’être capable de voyager en quelques mots seulement. »

K : Qu’est-ce qui faisait de vous un enfant si « sauvage » ?

PC : « En tant qu’enfant orphelin, même si je restais très positif et que je faisais de cette solitude une certaine force, j’étais malgré tout plus ou moins perturbé. Je conserve finalement assez peu de souvenirs. J’ai compris assez tôt qu’il valait mieux refermer les portes. Le passé ne m’intéresse pas, mais j’ai du mal à vivre dans le présent et je n’arrive pas à me projeter dans l’avenir. Je vivais, et je vis encore, pour me créer un objectif. Je n’ai jamais perdu l’espoir de quelque chose de meilleur. C’est je crois ce qu’il manque à notre société. L’espoir ! Lorsque j’étais au lycée, j’étais un adolescent avec tous ses excès : le vin de Chaintres, la cave de la grand-mère ! J’avais un équilibre à trouver et je mélangeais cette recherche d’équilibre avec une soif de faire la fête et de me sortir de la tête cette condition. J’ai conservé cette addiction durant une dizaine d’années, puis l’année de mes trente ans, j’ai décidé d’arrêter complètement de boire et depuis 41 ans, je n’ai pas bu une goutte d’alcool. »

K : Que faisiez-vous à cette époque ? Des métiers, des passions ?

PC : « C’est à l’adolescence que j’ai découvert la musique et que je suis tombé dedans. Je me souviens aussi être allé au festival de l’ile de Wight en 1970. C’était le plus grand festival du monde avec des centaines de milliers de festivaliers qui venaient écouter de la musique pop-rock avec une même spiritualité incroyable. Je n’en suis pas revenu comme avant et j’ai commencé à jouer de la musique, notamment de la basse et de la guitare électrique. J’ai joué dans plusieurs groupes, dont un qui faisait du bal et avait la singularité de jouer beaucoup de musique pop-rock en parallèle de « variét’ » de l’époque. Sur 5h on faisait au moins 2h de pop-rock et pendant les 20 minutes d’accordéon, j’allais au bar ! Cela a duré de mes 18 à mes 22 ans. Durant quelques années, jusqu’à mes trente ans, j’ai vivoté et j’ai fait d’innombrables métiers. Je changeais beaucoup. J’atteignais rapidement mon niveau d’incompétence où je n’évoluais plus dans ce que je faisais et je n’apprenais plus. Je me fichais de me perfectionner dans un domaine, je voulais juste apprendre vite, comprendre et voir plein de choses. »

K : Vous avez également créé une boite de nuit à Saumur ?

PC : « En effet, en 1994 j’ai créé le Blues Rock Magazine, une boite de nuit-concert rue de la petite Bilange. Ce n’était toutefois pas une boite classique, je voulais créer un club à l’anglaise basé sur la musique pop-rock et blues que j’appréciais tant. Le tout en organisant des concerts. Il y avait des guitares sur le mur au-dessus du bar, des posters gigantesques un peu partout. Cela a duré 5 années et cela a été une expérience incroyable ! »

K : Et après ces 5 ans ?

PC : « J’ai arrêté et suis reparti en Touraine où je vivais en parallèle de Saumur le week-end quand la boite était fermée. Je voulais me consacrer à l’écriture après un premier roman policier réussi intitulé « Nom d’une bite ! », expression consacrée de Jean Carmet. Durant plusieurs années, je me suis consacré à l’écriture et j’écrivais au coup par coup. Je voulais véritablement trouver mon truc, ma patte, le style dans lequel j’aurais le plus de liberté. La liberté une fois encore ! J’ai mis du temps et c’est finalement avec le livre « Le Voyage » qui traitait d’un thème très difficile, que je suis parvenu à trouver mon style. Je recherche une relation directe avec le lecteur pour que je l’emmène rapidement dans une histoire et des personnages, au travers d’un texte contemporain, populaire, facile à lire pour tous sans pour autant être dénué de sens et d’intérêt. Finalement, dans les livres que j’écris, j’y mets ce que, moi, je recherchais dans les livres quand j’étais plus jeune. Finalement, il semblerait que l’on ne referme jamais complètement toutes les portes. Je crois qu’au travers de l’écriture que je pratique aujourd’hui depuis 25 ans, j’ai trouvé ma voie, j’ai trouvé ce que j’aime faire, après avoir tenté tant de choses et pris de nombreux de chemins. Je suis heureux lorsque j’écris et aussi heureux quand je rencontre les lecteurs et que j’échange avec eux. Finalement, c’est l’humain qui m’intéresse, et cela a toujours été le cas, tout au long de ma vie. »

Pierre Creet sera en dédicace au Carrefour Market de Distré ce samedi 24 juin (notre article)

Commentaires 1

  1. Lecteur de Limoges says:

    Un peu voyou, un peu tête de mule … Mais toujours surprenant !
    C’est comme ça qu’on l’aime

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