Saumurois. Histoire locale. La Maison Ackerman, pionnière des maisons de bulles du Val de Loire

A l’occasion des 140 ans de la cuvée royale d’Ackerman et des Journées Européennes du Patrimoine, les Caves saumuroises ouvriront leurs portes et présenteront des archives exceptionnelles. Retour sur l’histoire de la première maison de fines bulles du Val de Loire.

La Maison Ackerman est l’héritière de la Maison Ackerman-Laurance fondée en 1811 par Jean Baptiste Ackerman et Jean Pierre Apollinaire Laurance-Olivier, un habile négociant en grains et vins, à Saumur. Jean Baptiste, d’origine belge, apporte à la maison de négoce sa parfaite connaissance des marchés nord-européens et son réseau. A Saumur, il approfondi ses connaissances des cépages, des celliers et des vins de la Loire. Il noue des relations solides avec les propriétaires de vignes, les industriels et les commerçants des environs. Il négocie puis exporte les meilleurs vins rouges et blancs des coteaux de Saumur et des vignobles de Tours mais il ne fabrique pas encore de vins « façon de champagne ». Cette maison de négoce prospère sous la Restauration et l’alliance des deux hommes ne se limite plus au seul négoce. En 1829, Jean Baptiste se marie à la fille de son associé, Emilie Laurance. Il prend alors la direction d’une maison de négoce familiale, solidement ancrée dans le Saumurois mais ouverte sur l’extérieur.

Les vins « façon de champagne » de Saumur !

Jean Baptiste Ackerman trouve dans les vins de Tours et de Saumur des prédispositions pour fabriquer des vins « façon de champagne ». Les vins « moussent » naturellement. En 1831, il expérimente la champagnisation des vins à partir de cépages blancs du Val de Loire et met au point la méthode traditionnelle. Il commercialise ses premières bouteilles, seulement quelques centaines, dès 1834. En 1838, il présente à l’exposition industrielle d’Angers sa cuvée de 1836. Le jury, après les examens et les analyses œnologiques, lui attribue une médaille d’or: c’est le début de l’aventure des vins à fines bulles pour Jean Baptiste Ackerman et une nouvelle identité pour la ville de Saumur.

Une aventure industrielle et commerciale moderne

En 1840, Jean Baptiste Ackerman acquiert des caves « troglodytes » à Saint-Hilaire Saint-Florent, aux bords du Thouet, où la petite rivière a son embouchure avec la Loire. Les caves sont optimales pour stocker et pour fabriquer ses vins « de mousse » : température fraîche et constante, luminosité faible, grande capacité de stockage. Avec Jean Baptiste Ackerman, les caves troglodytes trouvent une seconde vie et deviennent le lieu de production et de commercialisation typiques des vins à fines bulles du Val de Loire. Les maisons de vins mousseux se multiplient dès le milieu du XIXe siècle et s’installent de part et d’autres des caves Ackerman-Laurance. Ces caves sont le cœur d’une nouvelle activité économique et sont de véritables manufactures où hommes et femmes, au savoir-faire unique, à la lueur des bougies, tirent le vin, tournent, dégorgent, musellent et étiquettent les bouteilles de vins à fines bulles qui s’exportent dans le monde entier.  Les caves témoignent aujourd’hui de l’activité quotidienne des ouvrières et des ouvriers des maisons de vins jusqu’au milieu du XXe siècle. Elles sont un élément de premier plan dans le paysage naturel et industriel du Saumurois et constituent un patrimoine unique aux bords du plus long fleuve de France, classé au patrimoine mondial de l’humanité : la Loire.

La Maison Ackerman-Laurance à la conquête du monde

Dans les années 1850, après plusieurs années de persévérance, la Maison Ackerman-Laurance n’est plus un petit commerce de négoce. C’est la première maison de vins mousseux du Val de Loire. Jean Baptiste Ackerman associe son fils, Louis Ferdinand, à l’entreprise familiale. Ensemble, ils orientent la production et la commercialisation des vins à fines bulles vers l’Angleterre en créant une marque légendaire : Royal. La marque, déclinée en Brut Royal et Dry Royal, rencontre un immense succès sur l’ïle et son empire puis se retrouve très vite sur les grandes tables du monde entier, de l’Europe aux Amériques. En 1863, Jean Baptiste laisse les rênes de la Maison Ackerman-Laurance à Louis Ferdinand, épuisé par toute une vie au service de son rêve. En 1866, Louis Ferdinand est seul à la tête d’une industrie en pleine expansion. Il profite de l’ouverture du commerce mondial pour développer son entreprise et faire connaître partout le nom et les vins de la Maison Ackerman-Laurance. Il rivalise alors avec les maisons de Champagne et livre une bataille publicitaire innovante et féroce. Il multiplie les créations de marque et crée un solide réseau d’ambassadeurs et de clients fidèles. C’est l’âge d’or de la Maison Ackerman-Laurance.

Une entreprise qui se modernise à l’aube du XXe siècle

En 1894, la Maison Ackerman-Laurance est une Société Anonyme au Capital de 3 millions de francs. Une fortune ! Louis Ferdinand reste le chef de l’entreprise mais il s’appuie sur un proche conseiller, Raymond de Luze, ainsi que sur son gendre Charles Elie de Laulanié. En 1901, la société ouvre un magasin à Paris, alors ville mondiale. En 1911, l’entreprise fête son centenaire à Londres à l’occasion du Congrès de la Wine Trade Benevolement Society. Maison Ackerman-Laurance est alors au cœur des deux capitales culturelles, économiques et commerciales les plus importantes au monde. Le rêve du fondateur Jean Baptiste Ackerman est devenu, à l’aube la Première Guerre mondiale, réalité.

1882-2022 : 140 ans d’une cuvée iconique

Lancée en 1882 par Louis-Ferdinand Ackerman, fils du fondateur Jean-Baptiste Ackerman, la cuvée Royal, déclinée aujourd’hui en appellation Saumur et Crémant de Loire, allie élégance, tradition et savoir-faire, à l’image de la Maison de fines bulles. En nommant sa cuvée « Royal », Louis-
Ferdinand Ackerman espère imposer ses fines bulles sur les plus grandes tables d’Europe et du monde. Son rêve devient vite réalité puisque le succès du Royal s’avère sans précédent ! Après avoir raflé les médailles dans les expositions, à l’instar de la célèbre Exposition Universelle de Paris de 1889
ou encore à l’International Liverpool Exhibition de 1886, la cuvée Royal part à la conquête des paquebots transatlantiques, des palaces jusqu’au siège du parlement du Royaume-Uni. De la fin du XIXème siècle jusqu’à aujourd’hui, grâce au savoir-faire transmis de génération en génération, le
Royal contribue au rayonnement de la Maison Ackerman.

A noter : Les caves Ackerman, situées rue Léopold Palustre seront ouvertes à l’occasion des journées européennes du patrimoine les 17 et 18 septembre 2022. A cette occasion seront présentées exceptionnellement des archives conservées aux archives départementales de Maine et Loire.

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